La journée de grève a bien entendu été très forte dans les transports publics locaux et à la SNCF. Il s’agit là de deux des secteurs qui se trouvent au centre de l’offensive actuelle du gouvernement quant à la réforme des régimes spéciaux de retraite, et il s’agit d’autre part de la véritable colonne vertébrale du mouvement ouvrier en France, notamment dans le cas des cheminots.
C’est ainsi à la SNCF que l’on enregistré les plus forts taux de participation à la grève appelée par les principaux syndicats. Selon la direction de l’entreprise, prés des trois quarts des salariés (73,5%) ont participé au mouvement, générant une quasi paralysie du trafic ferroviaire national. Le taux de grévistes à la SNCF a ainsi été supérieur ã celui de 1995, au plus fort de la grève de novembre et décembre, lorsque 67% des salariés de l’entreprise participait au mouvement. Le taux de participation à la grève du 18 montre donc bien la massivité du mouvement.
Les transports publics urbains ont également été fortement perturbés tant ã Paris, avec la paralysie totale de certaines lignes de métro et RER (la seule totalement opérante étant la ligne 14, entièrement automatisée), que dans 28 villes de Province où le préavis de grève avait été déposé.
L’un des éléments les plus significatifs de la grève est certainement le fait que dans de nombreuses AG de cheminots, la grève a été reconduite pour le 19. C’est notamment FO et SudRail qui ont poussé en ce sens, contre l’avis de la CGT qui n’était en faveur que d’une grève de 24 heures. Il est par conséquent fort probable qu’une bonne partie du trafic SNCF et public soit bloqué vendredi 19. Ces signes extrêmement encourageants indiquent un certain état d’esprit à la base et qu’un secteur du salariat entend réellement lutter conséquemment, même si cela ne signifie pas encore le début d’une épreuve de force sur la longue durée. Lundi, de nouvelles AG sont prévues.
La manifestation de Paris a réuni quelques 25.000 personnes, en grande partie défilant sous les banderoles de la CGT, alors que dans le reste du pays 130 manifestations locales ont fait descendre dans la rue plus de 300.000 personnes (selon les syndicats, la police donnant le chiffre de 150.000). D’autres secteurs du salariat du public ont également participé ã cette journée de grève, bien qu’avec un taux de participation moindre, comme ã La Poste, dans l’Education nationale, à l’ANPE et aux Assedic où les employés se battent contre le projet de fusion des deux entités.
Le gouvernement a tout fait pour se montrer le plus conciliant possible, le ministre du Travail, Xavier Bertrand, insistant notamment sur le fait que la réforme des régimes spéciaux ne serait que “progressive” et que “la grève n’empêche pas le dialogue ». Le chantage du gouvernement reste cependant le même. Sans la réforme, l’avenir des pensions n’est pas assuré et selon le porte-parole de l’Exécutif Laurent Wauquiez le gouvernement ne saurait céder sur l’extension de la durée des cotisations et l’alignement sur le régime des 40 années de cotisation et plus de la réforme Fillon. Pour ce qui est de la CGT, Bernard Thibault a appelé de ses vœux à l’ouverture de « réelles négociations », laissant présager de nouvelles réunions au sommet entre le gouvernement et la bureaucratie syndicale la semaine prochaine.
Il est certainement significatif en tout cas que la grève en France ait eu lieu quasi au même moment que celle des employés de la Deutsche Bahn allemande , un conflit qui marque une certaine rupture par rapport aux politiques d’austérité salariale en cours. Il pourrait s’agir d’un véritable retournement de situation pour le principal pays de l’Union européenne.
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