Défendre les conquêtes de la révolution contre le blocage impérialiste et les plans de restauration de la bureaucratie.
Dans le cadre d’une importante crise de l’économie cubaine, dont on sent les conséquences de la crise capitaliste internationale et aussi de la continuation du blocus impérialiste, le président Raoul Castro a annoncé, face à la Assemblée Générale du Pouvoir Populaire, toute une série de mesures économiques, comme par exemple la construction des complexes touristiques de luxe, l’autorisation pour ouvrir des nouveaux magasins avec la possibilité d’employer de la main d’œuvre (jusqu’à présent la plupart d’entre eux sont loués aux employés, mais c’est l’Etat qui est propriétaire).
L’objectif du gouvernement cubain est de réduire le grand déficit fiscal ã travers un plan d’austérité qui comprend le licenciement de 500.000 travailleurs de l´Etat pendant le premier trimestre de 2011 et le replacement de ces travailleurs dans les activités privées, bien comme travailleurs indépendants, bien comme coopérativistes ou bien comme employés. Avec cette pretendue « restructuration de la force de travail », les conditions pour le développement d´un marché de travail qui n´existe pas encore à l´île sont en train de se créer, malgré les réformes pro capitalistes, lesquelles, ã des rythmes différents, se sont introduit depuis la période spéciale. On ajoute ã cela la réduction budgétaire et celle des allocations qui se sont déjà fait, comme la lente élimination des restaurants ouvriers et les réductions dans les cartes de rationnement. Ces mesures sont accompagnées d’un discours réactionnaire contre « l’égalité » et « le paternalisme étatique » comme racines des maux de l’économie.
Ces annonces arrivent très peu de temps après que Raoul Castro ait décidé de libérer les 52 prisonniers politiques arrêtés pendant ce que nous appelons « le printemps noir » en 2003. La libération de ces prisonniers fut négociée avec l’Eglise Catholique et l’Etat Espagnol, suite à la crise déclenchée par la mort d’Orlando Zapata Tamayo et la grève de la faim du journaliste opposant Guillermo Fariñas. Ces faits ont été utilisés par les Etats Unis et la dissidence interne pro-impérialiste afin de renforcer la pression sur le régime pour avancer vers la restauration capitaliste.
Face à la possibilité que l’état de santé de Fariñas puisse déclencher une nouvelle crise interne et nuire encore plus aux relations internationales de l’Etat Cubain, surtout avec le gouvernement espagnol qui est en tête des négociations pour que l’Union Européenne abandonne la soi-disant « Position commune » de sanctions et restrictions commerciales envers l’île, le président Raoul Castro a décidé de faire appel aux « offices médiateurs » de l’Eglise Catholique locale. L’archevêque de La Havane, le Cardinal Jaime Ortega, s’en réjouit.
L’Eglise a développé une très importante organisation interne, avec des publications et des séminaires. Ses économistes exigent des « réformes structurelles » et gardent plusieurs liens avec des partis cubains capitalistes qui sont à l’exil, ainsi qu’avec les gouvernements impérialistes. Comme en Pologne dans les années 1980, l’Eglise sera un acteur clef dans tout le plan de « transition » négocié avec le régime vers une ouverture capitaliste graduelle.
Ces changements annoncés par le gouvernement ont coïncidé avec la réapparition publique de Fidel Castro depuis 4 ans d´absence, et avec ses déclarations ã un média américain que « le modèle cubain ne fonctionne déjà même pas pour nous », ce qui a été interprété comme un soutien de Fidel au chemin pris par son frère Raoul et aussi comme un signe vers les secteurs du Parti Communiste Cubain (PCC) et la bureaucratie étatique, surtout ceux qui sont liés aux nouveaux business, qui seraient en train de faire pression sur le gouvernement pour accélérer la restauration du capitalisme et qui pourraient déclencher une lutte interne avec des conséquences imprédictibles sur le régime.
Depuis 50 ans l’impérialisme américain essaie de vaincre la révolution cubaine qui encore aujourd’hui symbolise l´avant-garde de la lutte contre l’oppression et l’exploitation partout dans le continent. Sa défense est une partie indissoluble de la lutte des travailleurs et des masses populaires dans l’ensemble du continent contre l’impérialisme, les bourgeoisies locales déclinantes et pour la révolution sociale dans toute l’Amérique Latine.
Pour nous qui nous revendiquons des marxistes révolutionnaires, il est très important d’avoir un programme claire et une stratégie pour abattre les plans de restauration capitaliste, qui tentent de s’imposer soit par la voie de la « réaction démocratique » encouragée par l’impérialisme, c’est ã dire en suivant plutôt l’exemple de la Russie ou des Etats ouvriers dégénérés de l’Europe de l’Est ; soit sous le control de la bureaucratie gouvernante, suivant le « modèle chinois ou vietnamien ».
Si la restauration du capitalisme dans l’ex-URSS, en Europe de l’Est et en Chine a renforcé l’offensive néolibérale, en même temps qu’elle a approfondi le recul de la classe ouvrière et la crise de la perspective de la révolution socialiste, la victoire de la restauration capitaliste ã Cuba signifierait, sans aucun doute, une grande défaite pour les travailleurs, les paysans et les secteurs exploités de la région et elle ouvrirait la porte ã une politique plus agressive dans l’ensemble de l’Amérique Latine de la part de l’impérialisme. La défense active des conquêtes de la révolution cubaine contre l’impérialisme et les plans de restauration de la bureaucratie ne signifie rien d’autre que la lutte contre cette perspective.
Les Etats Unis et l’Union Européenne : les deux côtés de la politique impérialiste ã Cuba.
Le gouvernement de Raoul Castro attendait que la libération des prisonniers puisse aider ã enlever quelques restrictions pour l’exportation d’aliments et pour les voyages vers l’île, deux thèmes qui doivent être discutées par le Parlement américain, ou qui puisse permettre une flexibilité dans la politique dure de l’Union Européenne. Cependant, cela n’est pas arrivé dans l’immédiat même si c’est un peu trop tôt pour évaluer ses effets. Jusqu’à présent, les Etats Unis continuent ã faire pression sur le gouvernement pour qu’il continue avec des gestes de « bonne volonté » avant d’envisager une mesure qui rende plus souple le blocus.
Le gouvernement d’Obama a déjà montré qu’il garde l’essentiel de la politique impérialiste qui combine l’étouffement économique par la voie du blocus avec l’exigence « d’ouverture démocratique » en tant qu’une forme de pression pour la restauration du capitalisme, appuyée sur la communauté « gusana » ã Miami. Cette politique est la politique historique des Etats Unis suite à la tentative ratée d’invasion à la Baie des Cochons qui a montré l’impossibilité d’une attaque directe.
Au delà de quelques concessions partielles concernant l’envoie des livraisons ou par rapport aux voyages des cubains résidants aux Etats Unis à l’île, Obama a conservé le même blocus inhumain que les Etats Unis appliquent depuis 50 ans (en ce qui concerne aussi la nourriture et les médicaments) et qui a déjà fait des dégâts économiques de plus de 80.000 millions de dollars pour Cuba.
Cette politique qui consiste ã poursuivre avec le chantage du blocus pour exiger des changements politiques et économiques au gouvernement cubain, ou comme disent des secteurs plus durs, pour provoquer un « changement de régime », s’inscrit dans une stratégie plus générale de la part de l’administration démocrate. Cette stratégie consiste ã recomposer la puissance traditionnelle de l’impérialisme américain en Amérique Latine, qui a été affaiblie pendant les années du président Bush avec la défaite du projet de l’ALCA et la priorité qui a été donnée aux guerres d’Irak et d’Afghanistan. Cette situation, et aussi l’augmentation des prix des matières premières produites par les pays de la région, surtout le pétrole, a fait que certains gouvernements latino-américains essaient de négocier leur relation avec l’impérialisme. Ce fut le cas de Chavez au Venezuela qui a pu avancer avec son projet ALBA dans certains pays de l’Amérique Centrale, alors que c’est une région qui faisait parti de la sphère d’influence des Etats Unis en politique extérieure et aussi dans le domaine économique avec le CAFTA (Traité de Libre Commerce d´Amérique Centrale). De même, le gouvernement de Lula a eu aussi quelques différences avec les Etats Unis en ce qui est la politique extérieure, même si cela ne cherche pas ã modifier la position subordonnée du Brésil en thermes de politique mondiale.
L’objectif d’Obama de recomposer la domination impérialiste dans la région que, historiquement, a été considérée comme son « arrière cour », s’exprime dans une politique militariste plus agressive qui comprend l’instalation de sept nouvelles bases militaires américaines en Colombie, l’occupation virtuelle d’Haïti après le tremblement de terre, l’hostilité envers le Venezuela a travers le gouvernement de la Colombie et, aussi, le soutien au coup d’Etat au Honduras.
Face á l’intransigeance des Etats Unis, il y en a qui présentent la politique plus « affaiblie » et « qui tente de négocier » de la part de quelques pays de l’Union Européenne, surtout de l´Etat espagnol, en tant qu’une alternative plus favorable pour Cuba. Ceci est une véritable supercherie. En Décembre 1996, l’UE a adopté la soi-disant « Position Commune » qui est une autre façon de chantage et d’utiliser la pression économique pour que le régime cubain facilite la « libéralisation économique » et « l’ouverture démocratique ». Les tentatives du gouvernement espagnol de Zapatero que l’UE change la « Position Commune », répondent aux intérêts des capitaux espagnols qui ont des business très importants sur l’île.
Malgré les divergences tactiques, les Etats Unis, l’UE et l’Eglise Catholique partagent la stratégie de restaurer le capitalisme ã Cuba, en remettant le pays ã son status de semi-colonie d’avant la Révolution de 1959.
La politique des bourgeoisies latino-américaines
Contrairement aux années 90, la plupart des gouvernements latino-américains ont des bonnes relations avec Cuba, sauf ceux qui sont plus pro-américains –par exemple la Colombie-. Ils ont même leurs propres plans pour négocier avec le régime de Raoul afin de pouvoir faire d’investissements profitables pour leurs capitaux, et aussi d’incorporer l’île à la structure capitaliste du continent. Un exemple de cette politique a été la proposition de réadmettre Cuba dans l’OEA, ã partir du Sommet de La Trinité. Cette proposition a été rejetée par le gouvernement cubain.
Le Venezuela et le Brésil sont ses deux principaux partenaires commerciaux dans le continent. Dans le cas du Venezuela, Chavez subventionne l’économie cubaine ã travers le prix différentiel du pétrole et l’achat massif de services professionnels (surtout médicales) qui rapporte des revenus similaires ã ce qui rapporte l’activité touristique, selon les experts. En échange, Chavez obtient des privilèges pour les investissements de PDVSA ã Cuba, en ce qui concerne l’exploration et le raffinage.
De son côté, Lula a une très proche relation avec les Castro car cela lui a rapporté des importants business et qui répresente une politique de restauration : les entreprises brésiliennes sont devenues les secondes, au niveau d’exportation d’aliments (après les Etats Unis). Au moment de sa visite en février 2010, ces investissements ont touchés aussi le secteur hôtelier et d’infrastructure (reconstruction du Port Mariel et des logements), dans le secteur agroalimentaire, l’industrie pharmaceutique et dans le pétrole, ce dernier en étant un secteur stratégique visé par Petrobras.
Les révolutionnaires ne nous opposons pas au fait que l’état Cubain ait des relations économiques et diplomatiques profitables avec des pays comme le Venezuela ou le Brésil. Cependant, la politique de la bureaucratie est de créer des illusions sur des gouvernements « progressistes » latino-américains et de faire confiance en leurs alliances au lieu de s’appuyer sur les exploités du continent. Même Fidel Castro présente le tiède nationalisme bourgeois de Chavez et son soi-disant « socialisme du XXIème siècle » avec les patrons, comme si cela était l’héritage de la révolution cubaine.
À vrai dire, ces gouvernements sont plutôt des « amis » du régime cubain mais ce sont des ennemis de la révolution sociale et ils représentent une autre voie pour la restauration capitaliste.
La bureaucratie cubaine et « le modèle vietnamien »
Bien qu´avec un discours « socialiste » et « anti-impérialiste », la bureaucratie gouvernante revendique depuis des années le soi-disant modèle chinois ou vietnamien, c’est ã dire, un programme pour aller vers un processus graduel de restauration capitaliste sous la direction du PCC. La bureaucratie cubaine prend des mesures qui vont dans ce sens là . Il semble cependant que c’est difficile pour le régime cubain de suivre le chemin de ces pays asiatiques.
En premier lieu, ã Cuba, il existe un certain détachement des traditions révolutionnaires, qui a été généré par la domination de la bureaucratie et renforcé par les années de la réaction politique et idéologique après la disparition de l’URSS. Malgré cela, il existe encore une certaine conscience égalitaire et un très fort sentiment anti-impérialiste. En même temps, il n’y a pas eu de défaite comme ce fut en Chine par l’écrasement du soulevement de Tiananmen en 1989.
Deuxièmement, contrairement à la Chine ou le Vietnam, tous les deux admis à l´Organisation Mondiale du Commerce (OMC), l’impérialisme américain maintient une politique de blocus économique. En plus, il y a la menace de la bourgeoisie cubaine exilée ã Miami, ã 140 km de Cuba, qui réclame toujours ses propriétés expropriées par la révolution de 1959.
Ces aspirations de la bureaucratie gouvernante se montrent chimériques lorsque nous tenons compte de la différence d’échelle entre l’économie cubaine et l’économie chinoise et même vietnamienne, laquelle avait pris une partie de l’investissement étranger dans les 90 et s’est transformée dans une plateforme pour l’exportation vers les pays asiatiques.
La Chine a été bénéficiée par son rôle en tant que fournisseur de main d’œuvre bon marché, elle a attiré d’investissements capitalistes et elle est devenue une des principales économies au niveau mondial. Les gouvernements qui ont mené à la restauration capitaliste dans les ex pays du « bloc socialiste » de l’Europe de l’Est montraient comme perspective l’incorporation à l’Union Européenne. Finalement, ils ont été intégrés en tant que « cour arrière » des principales économies, surtout de l’Allemagne. Après quelques années de croissance ils souffrent les conséquences de la crise capitaliste. Même en Russie, où la restauration capitaliste a signifié une catastrophe sociale et une très grande destruction du pays, elle garde toujours un status de puissance régionale et elle a le deuxième arsenal nucléaire du monde, derrière les Etats Unis.
Les conséquences de la restauration capitaliste ã Cuba seraient encore plus catastrophiques, puisque, au-délà des rythmes, son destin inévitable sera de reculer aux standards de pauvreté et de marginalisation des pays semi-coloniaux des Caraïbes et Amérique Central, subordonnés à l’impérialisme américain.
Jusqu’où la bureaucratie a-t-elle avancé avec son programme de restauration graduelle ?
L’analyse concrète de l’économie cubaine montre que le rythme d’implémentation des mesures d’ouverture économique aux investissements capitalistes n’a pas été un processus constant depuis le début de la soi-disant « période spéciale ». De même, cette analyse montre que malgré le cours de restauration de la propre bureaucratie qui ne fait que décomposer encore plus les bases de l’Etat ouvrier déformé, il serait une erreur de penser que le capitalisme a été déjà restauré sur l’île et qu’il ne reste aucune conquête ã défendre, ou encore pire, de penser que ce n’a jamais été une économie de transition, comme disent les théories collectivistes bureaucratiques ou capitalistes d’Etat. La propriété mixte a été légalisée dans quelques secteurs importants de l’économie, mais la propriété nationalisée des moyens de production est encore prédominante. Cela explique aussi le fait qu’il n’a pas été encore possible de recréer une nouvelle classe exploiteuse locale ou de restaurer les propriétés des « gusanos » ã Miami. Cette situation apparait aussi dans le secteur agricole, où la terre est encore une propriété de l’Etat, ce qui veut dire que les parcelles données à l’usufruit privé ne peuvent pas être transférées ou vendues. Si cela arrive, il menerait à la concentration et au surgissement d’une bourgeoisie propriétaire terrienne.
Nous sommes face ã un processus encore ouvert dont les avancées et les reculs dépendent non seulement des conditions internes sur l’île, mais aussi des éléments de la situation et l’économie internationale, comme par exemple la politique impérialiste, le boom des matières premières et la crise de l’économie mondiale, et surtout, la relation de forces plus en général dans la région.
De ce point de vue, le processus de restauration capitaliste ã Cuba a avancé pendant les années 90, dans le cadre de l’essor néolibéral et d’un durcissement de la politique américaine sous le président Clinton, avec l’implémentation de la soi-disant loi Helms-Burton. Ce processus a été plus lent ã partir de 2003 et même il y a eu un recul avec quelques mesures, sans revenir en arrière en l’essentiel. En même temps, il y a eu la chute des gouvernements néolibéraux en Amérique Latine comme conséquence d’une tendance à l’action directe qui a parcouru une grande partie du continent et qui a été déviée ã cause de l’émergence des gouvernements bourgeois auto-dénommés comme des gouvernements « progressistes ». C’était l’arrivée au pouvoir d’Evo Morales en Bolivie et la consolidation du tiède nationalisme bourgeois de Chavez au Venezuela.
Depuis que Raoul a succédé ã son frère Fidel, il a réaffirmé le cours du régime cubain pour avancer de façon graduelle dans l’introduction des mesures capitalistes, en annonçant le besoin de l´implémentation des « changements structuraux et conceptuels » dans l´économie. Dans le cadre de la crise économique mondiale, les derniers événements montrent qu’une combinaison de différents éléments peut précipiter ce processus. Ces éléments peuvent être : la disparition de Fidel Castro de la scène nationale l’apparition d’une politique plus dialoguiste de la part de l’impérialisme américain et les « gusanos » de Miami qui assure à la « vieille garde » de la bureaucratie du fait qu’il n’y aura pas de représailles judiciaires par rapport aux expropriations faites pendant la révolution et qu´ils prennent la décision d´investir capital, comme par exemple a fait la bourgeoisie chinoise refugiée au Taiwan ; un rôle plus clair de la part de l’UE, surtout de l’Etat Espagnol, afin de faciliter cette politique de négocier ; et en dernier lieu, un impact plus profond de la crise économique internationale qui amène ã une situation de chaos économique.
Nous, les révolutionnaires, ne sommes pas contre, par principe, du fait qu’un Etat ouvrier soit obligé a faire des concessions au capital, en circonstances difficiles qui mettent en danger sa propre existence, ou dans une étape de profonde réaction et restauration bourgeoise, comme celle qu´on a vecu depuis le début des années 80, tel que l´a fait l’Etat ouvrier russe sous la direction de Lénine pendant la NEP. Cependant, lorsque ces mesures sont accomplies par une bureaucratie étatique privilégiée, comme celle du PCC, qui fait des éloges du cours de restauration suivi par les partis communistes chinois et vietnamien, loin d’être des mesures d’un recul transitoire pour assurer la survivance des bases non-capitalistes de l’Etat, elles sapent les piliers de l’économie nationalisée et créent des bénéfices additionnels pour les fonctionnaires du régime associés aux nouveaux business. Par exemple, les membres des FAR (Forces Armées Révolutionnaires) font partie d’une « proto-classe » qui est prête ã devenir une classe capitaliste s’il y a un changement dans les conditions politiques et économiques. C’est ainsi que nous avons des cas de corruption dans la haute hiérarchie du régime, laquelle fonctionne en tant qu’un moyen d’accumulation primitive individuelle basée sur le vol, les privilèges et la subornation, conséquences de l’administration de la propriété étatique.
Les réformes pro-capitalistes pendant la « Période Spéciale » (1989-2003)
En comparaison avec le reste des pays d’Amérique Centrale et des Caraïbes ou en comparaison avec les conséquences de l’offensive néolibérale en Amérique Latine (qui continuent avec les gouvernements soi-disant « progressistes »), Cuba est toujours une référence pour les masses dans la région, surtout grâce ã ses conquêtes matérielles comme par exemple la santé et l’éducation gratuites. Ces conquêtes s’expliquent grâce au fait que l’Etat cubain est basé fondamentalement sur des relations sociales non-capitalistes, malgré le régime bureaucratique et malgré aussi les concessions au capital qui sont en train de se faire.
Cependant, la domination prolongée de la bureaucratie a sapé ces bases de façon progressive. Ce processus a fait un saut surtout dans les deux dernières décennies car le régime cubain a pris des mesures plus ouvertement pro-capitalistes.
L’économie cubaine est basée sur la monoculture de la canne ã sucre. Pendant des décennies, elle a été dépendante des subventions qu’elle recevait de l’ex-URSS et du commerce avec les pays qui faisaient partie du CAME (Conseil d’Aide Mutuelle Economique), auquel Cuba s’est intégrée en 1972. Cette dépendance s’est dévoilée après la disparition de l’Union Soviétique et le soi-disant « Bloc socialiste » entre 1989 et 1991. Du moment où l’aide soviétique est fini et le blocus américain s’est approfondi, Cuba a souffert la pire des crises économiques de son histoire, qui a abouti son point maximum en 1993, avec une chute de 35% du PBI. Cette situation critique s’est prolongée jusqu’à la fin de la décennie, ã une croissance moyenne de -1,4%. Dans le cadre de cette crise et de l´isolement international de Cuba ã cause du renforcement de l’offensive néolibérale et de la consolidation de la restauration capitaliste dans le reste des ex-Etats ouvriers bureaucratisés, le régime de Fidel Castro a mis en œuvre tout un tas de mesures économiques au début des années 90, connu comme « la période spéciale en temps de paix ». (Voir Eduardo Molina : « Cuba en la encrucijada », EI 20, septembre 2003).
La réforme constitutionnelle en 1992 a légalisé les entreprises mixtes (associées avec le capital étranger) et la petite propriété. De même, elle a affaibli les mécanismes de la planification économique et a pratiquement démantelé le monopole du commerce extérieur.
En même temps que l’économie s’ouvrait au capital étranger dans certains domaines (comme le tourisme), il y a eu une avancée sur la délocalisation d’une grande partie de l’appareil productive, tout en laissant sous l’orbite de la planification étatique et en dehors de l’investissement étranger privé, les secteurs de l’économie qui ne produisent pas de devises : la santé, l’éducation et les entreprises du secteur de défense. Cette réforme a signifié la libéralisation des contrôles sur les entreprises privées, mixtes et les services publics, qui ont commencé ã opérer sous leur propre responsabilité en ce qui concerne les importations et les exportations. La planification de l’économie a été pratiquement suspendue entre 1990 et 1996, moment où quelques éléments de la planification ont été graduellement repris (Voir Y. Martinez Pérez : « El proceso de planificación empresarial en Cuba », Universidad de Cienfuegos, 2008).
Ce cours s’est approfondi avec l’approbation de la Loi d’Investissements Etrangers en 1995, qui donnait aux entreprises le droit de rapatrier les bénéfices obtenus ã partir de l’activité économique ã Cuba et leur donnait des garanties contre des possibles expropriations. Pendant les premières années de la période spéciale, la plupart d’investissements étrangers, surtout espagnols et canadiens, se sont concentrés sur des différents secteurs, principalement sur le tourisme et l’extraction minière.
Au mois d’août 1993, le gouvernement a dépénalisé la possession de devise de la part de la population ainsi que de la part des entreprises. La dualité monétaire s’est mise en place avec la dollarisation partielle de l’économie, surtout en ce qui concerne la vente détaillante, les comptes d’épargne et les opérations des entreprises, pendant que les salaires, les pensions et l’épargne de la plupart de la population se sont maintenus en Pesos Cubains. C’est ainsi que le gouvernement a essayé de stabiliser un secteur de l’économie lié à l’investissement étranger qui était perçu comme le moteur de la relance économique.
L’introduction de cette double circulation monétaire a mis en relief les profondes divergences sociales entre ceux qui étaient liés aux secteurs qui généraient les devises, surtout les fonctionnaires du régime, et la plupart de la population qui n’avait pas d’accès au dollar (Voir Pavel Vidal Alejandro : « Los salarios, los precios y la dualidad monetaria », Estudios Económicos Cubanos, 2008).
En 1997 le gouvernement a autorisé l’implantation des zones franches dans lesquelles les entreprises profitent des conditions exceptionnelles en matière douanière, de travail, migratoire, bancaire, fiscale et de commerce extérieur. Cela a produit d’énormes pressions pour la restructuration de l’ensemble de l’économie vers une insertion de plus en plus dépendante et subordonnée au marché et à la dynamique du système capitaliste impérialiste.
A partir de 1998 le « Perfectionnement patronal » s’est étendu. Ceci était un mécanisme mis en place par les entreprises de l’orbite militaire envers les entreprises de l’Etat sous contrôle des FAR. A partir de ce moment-là , ces entreprises ont été incorporées de façon graduelle au programme jusqu’au 30% à la fin de 2008. Ce plan signifie une autonomie relative des entreprises et la gestion en fonction des critères d’efficacité et de rentabilité, de stimulants individuels pour les travailleurs (une émulation du stakhanovisme soviétique) et le paiement du salaire en fonction de la productivité (ceci a été étendu à l’économie dans son ensemble).
Dans le secteur agricole, l’exploitation d’une partie de plus en plus large des terres a été transférée aux coopératives et aux agriculteurs individuels qui disposent environ 20% de leur production de façon privée. Bienque pour éviter le chaos social, le gouvernement a introduit une carte de rationnement avec des biens de consommation minimum ã des prix subventionnés, elle n’arrive qu’à satisfaire les besoins de consommation pendant 15 jours.
Pendant cette période, la brèche entre les fonctionnaires du régime et les secteurs qui ont accès au dollar d’un côté, et la plupart de la population cubaine de l’autre, s’est considérablement élargie. Le peuple cubain ressent le manque des biens et des services essentiels, comme la nourriture, les transports et l’électricité, en plus de voir leurs conditions de vie chuter de façon catastrophique.
De cette manière, selon dit J. Habel « la dollarisation a modifié l’ancienne hiérarchie des salaires, qui était assez égalitaire », concernant surtout aux travailleurs du secteur public, qui représentent autour du 80% de la force de travail (« El castrismo después de Fidel, un ensayo general », Viento sur, mayo de 2008).
La recentralisation de l´économie
Depuis 2003, l´économie cubaine se remet ã croître sur la base de l´exportation du nickel, particulièrement à la Chine. Elle profite aussi son lien avec l´ALBA, en recevant du pétrole de Venezuela ã prix subventionnés et en augmentant l´exportation de services professionnels ã ce pays, surtout de médecins, ce qui a signifié un important revenu de devises. De cette manière, le Venezuela et la Chine ont devenu les principaux partenaires commerciaux de Cuba, avec le 41% environ du commerce entre les deux, déplaçant l´Espagne et le Canada. L´incorporation à l´ALBA, à la fois, a permis de contrecarrer l´isolement que l´adhésion des pays voisins d´Amérique centrale impose au CAFTA (Traité de Libre Commerce de l´Amérique centrale).
Avec la reprise de la croissance économique, Fidel a lancé la dite « bataille des idées », une période pendant laquelle, selon l´économiste Mesa Lago, « il a recentralisé les décisions économiques, il a dédollarisé l´économie, il a créé un compte unique à la Banque Centrale de Cuba (BCC) pour faire le dépôt de toutes les devises et il a coupé le petit secteur privé pour compte propre (Voir Carmelo Mesa Lago, « La economía cubana en la encrucijada : el legado de Fidel, el debate sobre el cambio y las opciones de Raúl », Real Instituto Elcano, 23-04-2008). La quantité d´entreprises mixtes pendant l´année 2000 s´est réduit de 358 ã 250 en 2009, et avec cela, le volume de l´investissement étranger direct. Bien qu´on n´a pas restitué les mesures structurelles prises pendant les années critiques de la période spéciale, parmi lesquelles, la participation du capital étranger dans des secteurs stratégiques comme l´exploitation du pétrole ou du nickel, où opère l´entreprise multinationale canadienne Sherritt, la recentralisation de l´économie et la reprise d´un contrôle majeur de l´Etat, y compris un certain niveau de planification bureaucratique et la centralisation des devises par l´Etat, ont empêché la généralisation des rapports capitalistes et la création d´un marché de travail, que Raoul Castro essaye d´obtenir au moyen de leurs réformes actuelles.
Dans l´année 2003 on a dédollarisé l´économie et le dollar a été remplacé par le CUC (la monnaie cubaine convertible qui s´utilise pour acheter des devises et pour acheter des biens de consommation importés dans les magasins de ventes au détail spéciaux). Cela a permis de concentrer autour de l´Etat les devises disponibles et de contrôler leur assignation, ce qui a des conséquences tant sur le plan interne que dans les opérations du commerce extérieur.
Quant à la planification, il y a eu un certain rétablissement d´un plan économique pour les entreprises 100% cubaines, où y interviennent le Ministère d´Economie et de Planification et la Banque Centrale. Cette relative planification bureaucratique combine les assignations du budget de l´Etat avec les décisions d´investissements, lesquelles ont passé des secteurs qui ne sont pas en rapport avec la génération de devises pendant les années de la période spéciale, ã d´investissements dans de secteurs de génération de devises rapides et dans la substitution d´importations, parmi lesquelles, l´énergie et la biotechnologie (Voir « Plan Económico Social 2010, Lineamiento de Presupuesto del Estado » présenté par le ministre Murillo au Conseil de l´Etat et de Ministres). Cependant, la gestion bureaucratique de l´économie, dont les travailleurs sont exclus, c´est tout le contraire ã une planification efficace, comme démontrent les pauvres résultats des plans économiques, s´orientant vers une planification ã niveau des entreprises selon les critères de productivité et de rentabilité, comme on peut l´observer dans l´élargissement du programme de perfectionnement des entreprises.
La concentration de devises a impliqué, de manière indirecte, une recentralisation de l´activité économique et du commerce extérieur, bien que cela n´ait pas signifié le plein rétablissement du commerce extérieur. Par rapport ã cet aspect, l´économiste Mesa Lago affirme que : « La Chine a brisé le contrôle du commerce extérieur par le ministère central et elle a dévalué la monnaie pour faire compétitives leurs exportations, tandis que le Vietnam a libéré le taux de change et a laissé flotter sa monnaie, avec de résultats semblables. Au contraire, en 2003, Cuba a restitué la modeste décentralisation du commerce extérieur des années 1990 et elle a reconcentré le pouvoir dans le Ministère du Commerce Extérieur et dans la Banque Centrale » (Carmelo Mesa Lago, op. Cit.).
Ce contrôle de l´Etat relatif s´exerce par l´assignation de devises pour la part d´un Comité constitué par la Banque Centrale et le Ministère d´Economie et Planification, ã des différents ministères, lesquels, après, font la distribution des assignations aux entreprises de l´Etat de leur orbite, ce qui est dénommé comme Capacité de Liquidité.
L´autre élément qui est en rapport avec le secteur externe de l´économie est le fait que l´importation-exportation se fait ã travers les entreprises autorisées (celles-ci sont de trois types : les entreprises de l´Etat, importatrices de biens de consommation pour la population et pour les entreprises privées, mixtes ou de l´Etat sans la licencie pour importer ; les entreprises de l´Etat qui ont de l´autorisation pour importer des biens pour leur activité ; et quelques entreprises étrangères qui ont de licence pour importer). En plus, les investisseurs étrangères ne peuvent pas vendre directement dans le marché et ils ne peuvent pas non plus embaucher de main d´œuvre cubaine. Les travailleurs cubains employés par des entreprises étrangères sont embauché par une agence nationale d´emploi, laquelle fournit cette main d´œuvre aux entreprises. L´affaire de la bureaucratie consiste ã toucher les salaires de ces travailleurs en dollars, et ã payer les salaires aux travailleurs en pesos cubains (Voir Loi 77 d’investissements étrangers). Un mécanisme similaire s´exerce sur les médecins qui vont travailler à l´étranger, auxquels l´Etat retient une partie de leurs salaires.
Ces mesures de recentralisation n´ont pas signifié une amélioration dans les conditions de vie de la plupart de la population. Malgré l´interdiction de la circulation du dollar, une dualité monétaire continue ã exister : le peso cubain dévalué, dont la plupart des travailleurs et des paysans touchent leurs salaires, et le CUC, le peso convertible, qui a une valeur 24 fois supérieure à la monnaie nationale, et auquel seulement ont accès les fonctionnaires du régime et les secteurs liés au tourisme ou ceux qui reçoivent les livraisons de leurs familles qui habitent à l´extérieur. Cela fait surgir une situation potentiellement explosive : tandis que le gouvernement a élargi les concessions aux secteurs qui ont accès au CUC, libéralisant l´achat de biens d´importation, comme DVD ou téléphones portables, et permettant l´utilisation des hôtels réservés au tourisme étranger, la plupart de la population, avec son salaire, ne peut pas accéder aux biens basiques qui ne sont pas inclus dans le carnet de rationnement qui fournit l´Etat, dont les prix sont exprimés en CUC.
Les mesures de Raoul et la crise économique
Le gouvernement de Raoul Castro pousse une série de mesures d´austérité, parmi lesquelles, la liaison des salaires à la productivité, l´augmentation de l´âge de retraite (sauf pour les membres de la FAR) et le coupe de conquêtes historiques, comme les restaurants ou l´allocation chômage, considérées « irrationnelles », cela est justifié par un discours réactionnaire qui cherche ã substituer l ´idée « égalitaire » qui a accompagné la révolution, par le critère de « l´effort individuel ».
A la campagne, ces mesures « d´efficace » ont mené ã élargir la concession de l´usufruit privé des terres aux coopératives et aux paysans individuels (ce qui atteint ã 77% des terres cultivées), et ã donner certains stimules, comme l´augmentation du prix que paie l´Etat par les produits de l´agro. De cette manière, encourageant l´enrichissement individuel, le gouvernement pense augmenter la production de biens alimentaires basiques qu´aujourd´hui Cuba doit importer.
La mesure la plus ancienne était la transformation des fermes de l´Etat en d´unités coopératives, et dans les dernières années, ces mesures se sont élargies à l’usufruit privé, lequel, selon quelques études, a atteint ã presque d´un million d´hectares ã 100.000 bénéficiaires. Mais cette contre-réforme agraire est même limitée : les concessions ne peuvent pas dépasser les 40 hectares par usufruitier, l´usufruit a un délai de 10 ans (bienqu´il peut être prorogé) et l´état maintient le contrôle des graines, des engrais et de la commercialisation finale au moyen de l´entreprise nationale d´approvisionnement, à laquelle les producteurs doivent donner le 70% de la production, avec les prix fixés par le gouvernement, ne restant que le 30% pour la commercialisation privée (Voir Armando Novoa, cité dans « Los cambios estructurales e institucionales », Boletín Cuatrimestral del Centro de Estudios de la Economía Cubana, avril 2010).
Depuis le passage des ouragans en 2008, qui ont ravagé une grande partie des récoltes et du reseau d´infrastructure de l´île, la bureaucratie a établit une série de restrictions à la distribution de nourritures et de produits agricoles, privilégiant les branches d´exportation, ce qui a reduit les quotas de consommation de la population, appliquant une politique de rationnement. En contrepartie, le gouvernement a été obligé d´intervenir dans les marchés de libre formation de prix, pour éviter que le déséquilibre entre l´offre et la demande mène ã une inflation dans les prix. L´offre est tombée et les prix sont restés au-dessous des coûts de production, approvisionnement et distribution. Le résultat a été que les marchés, dans les dernières années, souffrent un grand désapprovisionnement des articles de première nécessité pour la population. Face ã cette situation, la pression est de plus en plus grande pour avancer dans des mesures pro capitalistes, comme l´introduction de la propriété privée de la terre et une libéralisation majeure des marchés agricoles, qui permet de chercher aux producteurs des meilleurs prix dans les marchés extérieurs.
Le système de la bureaucratie pour la campagne est la cible pour la propagande de « l´inefficacité de l´Etat », pour démontrer que l´Etat ne peut pas prétendre de gérer l´ensemble de l´économie, et qu’il faut donner une occasion majeure à l´activité privée.
La crise économique internationale qui a éclaté par la chute de Lehmann Brothers touche sérieusement l´économie de l´île. Selon les statistiques officielles, l´économie n´a cru que le 1,4% (par rapport au 4,1% en 2008), tandis que la CEPAL estime que la croissance a été le 1%. Une combinaison de facteurs explique ces indices, parmi lesquels, la chute de 40% du prix international du nickel (l´exportation principale de Cuba) ; la baisse de 23% des exportations (selon la ONE, le volume du commerce extérieur s´est contraint de 37% en 2009) ; une chute de 11,7% dans les revenus de devises par l´activité touristique, dû à la récession mondiale ; la chute de 2% dans la production industrielle ; le pauvre résultat dans la récolte de la canne de sucre (la pire récolte des dernières décades, elle a tombé de 8 millions de tonnes en 1990 ã 1 millions actuellement), ce qui a empêché de se bénéficier de la montée du prix du sucre (données de la ONE et la CEPAL, cités par Carmelo Mesa Lago dans « La crisis global, sus efectos en Cuba en 2009 y las perspectivas para 2010 », janvier 2010).
A la fois, Cuba reste contrainte ã importer le 80% environ des nourritures basiques, surtout aux entreprises américaines, puisque dû à la grandeur de l´affaire, cela est la seule zone où le blocage n´est pas si strict. Cependant, cet accès ã des biens américains est très nuisible pour Cuba, qui est contraint ã payer leurs importations comptant.
Si la croissance rapportée pendant 2009 place ã Cuba au-dessus des indices négatifs que la plupart des pays de la région a enregistré pendant cet année, la contraction brusque de l´économie a eu (et continue ã avoir) des conséquences importantes. Cela s´ajoute ã ce que l´assistance que le régime cubain reçoit de Venezuela, non seulement dépend des fluctuations du prix de pétrole, mais du fait que Hugo Chavez demeure au pouvoir, parce que, s´il y avait un changement politique ã Venezuela, cet aide vitale disparaîtrait, comme jadis les allocations de la URSS. Cela pourrait précipiter le chaos économique, et une situation beaucoup plus critique ã celle qui a amené à l´implémentation de la période spéciale.
La première mesure drastique que le gouvernement a adopté est la reduction de 500.000 postes de travail à l´Etat pendant le premier trimestre de 2011 et la légalisation de formes d´emploi privé et d´activités indépendantes.
Quant à l´élimination de la dualité monétaire, qui est l´une des mesures ã prendre pour le gouvernement de Raoul, il semble difficile de pouvoir le faire. Non seulement il existe deux monnaies mais que il y a aussi des divers taux de change entre le peso cubain et le CUC.
Tandis que pour la population cela est de 24 pesos cubains par 1 CUC, pour les entreprises qui opèrent en pesos non convertibles, la valeur du peso cubain est 1 ã 1 avec le CUC, et ses bilans se calculent sur cette base survaluée.
Comme quelques économistes cubains reconnaissent, l´unification monétaire exigerait quelques « réformes de marché », en premier lieu, une dévaluation du type de change officiel, avec lequel « se déflaqueraient les comptes courants en pesos cubains des entreprises, c´est-à-dire, se réduirait leur pouvoir d´achat en termes de devises », ce qui inévitablement, mènera ã des pertes et des faillites, puisque le taux de change qui exprime le rapport avec les devises est de 1=24. (Pavel Vidal Alejandro : « La Dualidad Monetaria y la Política de Cambio de Cuba », Estudios Económicos Cubanos, 2009 ; Voir aussi Antonio M. Ruiz Cruz : « La dualidad monetaria en Cuba : principales problemas asociados y sus perspectivas », Observatorio de la Economía de América latina, N° 117, 2009 ; Pavel Vidal Alejandro : « Redimensionando la dualidad monetaria » ; P. Grogg : « Dualidad monetaria sigue en discusión », etc).
Les FAR comme avant-garde de la restauration capitaliste
Les Forces Armées Révolutionnaires, l´institution la plus solide et la meilleure organisée de l´Etat qui joie d´un grand prestige parmi la population, jouent un rôle clé dans l´économie depuis la décade de 1980. L´importance des FAR dans la direction des entreprises a fait un bond pendant la période spéciale, et elle s´est renforcée avec l´arrivée de Raoul Castro au gouvernement. Ces militaires directeurs d´entreprises, à la retraite ou en activité, ont reçu leur formation en entreprises et unités académiques des grands centres impérialistes, où ils ont acquis les critères capitalistes de rendement et productivité. En gardant leur loyauté à la direction des frères Castro, les FAR ont devenu le principal agent de la restauration capitaliste.
Depuis deux décades au moins, les membres les plus hauts de l´armée occupent de postes de direction dans une grande quantité d´entreprises liées au marché mondial. Selon les données officielles, ils dirigent plus de 850 entreprises de secteurs stratégiques de l´économie, qui vont du sucre et l´agriculture jusqu´au tourisme et les industries basiques, ce qui leur donne le contrôle de 65% environ des devises qui entrent dans le pays. Cette administration est organisée autour du groupe GAESA (Groupe d´Administration d´Entreprises), et, parmi leurs affaires, il y a le complexe empresarial touristique Gaviota, la distribution du gaz, l’extraction minière, l´aviation, et le secteur agricole. Cela a permis d´établir de rapports étroits avec leurs partenaires capitalistes étrangers, et d´accumuler des fortunes avec les nouveaux affaires dérivés de l´ouverture économique, et d´accéder aux privilèges comme des articles de consommation et des nourritures d´importation dans les magasins spéciaux, ou des soins médicaux différenciés, des meilleures maisons, de l´utilisation de voitures de l´Etat, de comptes à l´extérieur, entre autres.
Par leur rôle dans l´économie et dans le commerce extérieur, les membres plus hauts des FAR et ses membres liés a ces activités sont dans une position très bonne pour emporter le morceau, et pour passer d´être administrateurs ã propriétaires des moyens de production, associés au capital étranger.
Division et corruption dans les rangs de la bureaucratie
Cette situation, en plus de provoquer un malaise, a donné lieu depuis quelques années à l´épanouissement d´un marché noir et d´une économie au noire, lesquels fonctionnent avec la monnaie convertible.
La politique de « l´ouverture économique » qui pousse le gouvernement de Raoul a élargi la brèche sociale et elle est en train d´engendrer un mécontentement sourd, qui s´exprime par l´apathie ouvrière face au travail, et par la critique, de plus en plus croissante, aux différents personnages liés au régime, en même temps que les secteurs privilégiés dans les couches moyennes de la société et de la bureaucratie gouvernante prospèrent, préférant de se libérer du contrôle de l´Etat.
Cela s´exprime par un niveau de corruption jamais vu entre les fonctionnaires du régime, dénoncé par quelques intellectuels cubains, qui décrivent la situation dans les rangs du régime comme un « sauve qui peut ». Comme Esteban Morales, directeur émérite du Centre d´Etudes sur les Etats-Unis de l´Université de La Havane a affirmé : « quelques secteurs de la bureaucratie ont pris racine financièrement, au moment que la révolution soit tombée », tandis que d´autres « peuvent avoir presque tout préparé pour produire le transfert des biens de l´Etat aux mains privées, comme il est arrivé dans l´ancienne URSS ». Morales, qui a été récemment exclu du PCC par cette dénonce de corruption et vol de la propriété de l´Etat dans le sommet de la bureaucratie, énonce l´hypothèse que ces secteurs, qui occupent le même poste il y a quelques ans, « peuvent être les récepteurs de commissions et ils peuvent s´ouvrir des comptes bancaires dans d´autres pays ». (E. Morales Domínguez : « La corrupción ¿la verdadera base de la contrarrevolución ?, UNEAC, 9 de abril de 2010). Cette hypothèse s´appuie sur l´un des cas les plus récents de corruption à l´Institut d´Aéronautique Civile de Cuba, qui a fini par la destitution de son directeur, le général Rogelio Acevedo, qui appartenait à la vieille garde de la Sierra Maestra. Après ce cas, un autre grand scandale éclata, dans l´entreprise mixte Alimentos Río Zaza, où l´entrepreneur chilien Max Marambio, un ex militant du MIR et un garde de Salvador Allende, et plusieurs fonctionnaires et directeurs sont impliqués, accusés de subornation et détournement de fonds à l´étranger.
L´aiguisement des problèmes économiques, l´émergence de couches privilégiées qui agissent dans leur intérêts, l´apparition d´une opposition qui veut aller vers un régime de démocratie bourgeoise, parmi d´autres facteurs, ont ouvert une crise dans le régime laquelle, bien que contenue, s´exprime à l´intérieur du PCC. Raoul Castro continue ã repousser la tenue du Congrès du PCC, qui devait se faire en 2002 (le dernier Congrès était le V, qui a eu lieu en 1997) où l´on devait discuter le chemin ã suivre, par crainte de l´éclatement de la lutte sourde de cliques, que personne peut nier. Ces luttes internes se fît jour avec l´épuration faite au début de 2009, qui s´est terminé par la destitution de Carlos Lage et Felipe Pérez Roque, deux figures clés de la dite « nouvelle génération » liées ã Fidel Castro, accusées d´avoir eu une « attitude indigne » pendant son exercice dans les postes de l´Etat (et par la suite, accusés de liens avec les services secrets espagnols, une charge non démontrée).
Cette situation a établi une « double morale » , dont le gouvernement attaque les travailleurs « qui vivent de l´Etat » ã travers son discours et il cherche ã améliorer la « discipline du travail et sociale » au moyen de mesures productivistes ; tandis qu´il assure les privilèges matériaux de la bureaucratie de l´Etat et il tolère la corruption et l´enrichissement des fonctionnaires du régime et des membres des FAR et les manœuvres de survie des couches moyennes, qui cherchent la manière d´augmenter leurs revenus dans le marché noir et l´économie informelle. Ce double moral, qui commence au sein même de la bureaucratie et elle s´élargit à la société, sape les réserves subjectives pour faire face aux plans de restauration.
La capitulation « gauche » à la restauration capitaliste ã Cuba.
Le destin de la révolution cubaine partage les eaux dans la gauche latino-américaine et mondiale.
D´une part, les secteurs populistes et les faibles partis communistes du continent, confondant la défense des conquêtes de la révolution avec la défense inconditionnelle de la bureaucratie gouvernante, ont une position de soutient acritique au régime cubain, et ils justifient toutes les mesures qui prend le gouvernement, sans assumer même pas que la propre bureaucratie, particulièrement les FAR, constitue la force interne principale de la restauration capitaliste. Dans ce sens, ces « amis de Cuba » jouent un rôle semblable ã ceux qui Trotski appelait « les amis de l´URSS ».
Cette gauche populiste fait appel au argument vieilli de « n´importe quel critique au gouvernement de Raoul fait le jeu à la droite et à l´impérialisme » pour mettre fin ã toute discussion sérieuse sur l´avenir de la révolution cubaine, tant à l´intérieur de l´île, où ils sont partisans du régime de parti unique, que dans le reste du continent.
Bien que nous sommes disposés à l´unité d´action contre l´impérialisme et par la défense des conquêtes de la révolution avec tous ceux qui disent qu´ils les défendent, ces courants répètent la même politique néfaste que, pendant de décades, les ont mené ã soutenir la bureaucratie staliniste de l´URSS, la ex RDA et l´Europe de l´Est, comme les « représentants du socialisme », la mêmes qui n´a pas douté de devenir capitalistes et « nouveaux riches » au moyen du vol et du pillage de la propriété publique.
A l´extrême opposé, il y a les courants social-démocrates et les intellectuels libéraux qui considèrent que le problème principal qui fait face le peuple cubain ce n´est pas l´impérialisme et le danger de restauration capitaliste, mais le besoin d´un changement dans le régime, s´appuyant sur les libertés démocratiques formelles ; et en conséquence, ils se font écho de la campagne démagogique pour les « droits humains » et la « démocratie » lancée par l´impérialisme.
Derrière cette position, il y a quelques organisation qui se réclament du trotskisme comme la Liga Internacional de los Trabajadores (LIT) et son organisation principale, le Partido Socialista de los Trabajadores Unificado (PSTU) de Brésil, lequel affirme qu´à Cuba, l´axe est la « lutte frontale contre la dictature » et il réclame ouvertement « de libertés démocratiques pour les bourgeois ». Même le Partido Obrero en Argentine, face à la crise ouverte par la mort de Tamayo, a cédé ã cette ligne « démocratisant », en exigeant au gouvernement l´ouverture des centres de détention ã « l´inspection humanitaire internationale » : rien moins qu´une des excuses que l´impérialisme utilise pour couvrir son ingérence.
La LIT non seulement dit que le capitalisme a été restauré ã Cuba avec les réformes constitutionnelles introduites au début de 1990, et qu´il ne restent pas de conquêtes ã défendre, mais que cela s´est mené ã bien sans que la bourgeoisie cubaine en exile ã Miami le sache, et sans qu´une nouvelle classe exploiteuse nationale fasse son apparition, puisque Cuba aurait pratiquement devenu une semi-colonie du capital espagnol et canadien. Cohérent ã cette théorie absurde, la LIT définit le régime cubain comme une « dictature capitaliste » ou « bourgeoise » du PCC (sic), et elle arrive ã faire la comparaison avec la dictature de Videla et d´autres dictatures d´Amérique du Sud des années 1970 (Voir « Frente a la muerte de Orlando Zapata Tamayo y las libertades en Cuba », 18-3-2010, disponible en www.litci.org), et elle appelle à la renverser au moyen des méthodes de la « révolution démocratique », c´est-à-dire, avec un programme minimum de libertés démocratiques générales.
Cette politique place à la LIT en un front unique avec le gouvernement Obama, avec les « vers » de Miami, l´église et les « dissidents » internes, et elle signifie une capitulation scandaleuse vers la voie la plus probable de la restauration capitaliste : la contre-révolution démocratique. Mais, pour la LIT, cela fait parti de leur tradition politique. Pendant les processus antibureaucratiques de 1989 qui ont abouti à la chute des régimes stalinistes, la LIT soutenait qu´une première étape démocratique avait vaincu, ce qu´elle appelait « le février », caractérisée par un front unique de tous ceux qui étaient contre la bureaucratie, indépendamment de leur programme, pro-capitaliste ou pas. Puis, la LIT disait qu´une seconde étape de révolution ouvrière, « l´octobre », va prétendument la suivre. Cette théorie « par étapes » s´est démontré complètement fausse. Sans un programme de révolution politique, les soulèvements de 1989 ont abouti ã une grande défaite historique et ils ont conduit à la restauration du capitalisme. Mais la LIT ne se rend pas à l´évidence et elle a reformulé sa théorie pour conserver l´essentiel : maintenant, elle affirme que la restauration capitaliste était déjà consommé dans l´URSS en 1985, et que les révolutions de 1989 ont été « anticapitalistes » et elles ont triomphé parce qu´elles ont freiné les plans de thérapie de choc de la restauration (¡sic !). De cette manière, elle continue sans admettre la crise profonde qui a signifié la restauration capitaliste. Maintenant, elle répète la même chose pour Cuba, et elle justifie sa politique claudicante et liquidationniste des conquêtes qui restent de la révolution avec l´argument que le capitalisme est déjà restauré et qu´il s´agit de renverser la « dictature capitaliste » du PCC, même avec les vers et la « dissidence » financée par Washington.
Contre ces deux positions, lesquelles conduisent ã soutenir les différents agents de la restauration capitaliste par des voies différentes, les marxistes révolutionnaires luttent pour une révolution politique qui recrée les bases d´un état ouvrier révolutionnaire et nous appelons les travailleurs et les masses populaires de la région à lutter contre le blocus impérialiste et ã défendre les conquêtes de la révolution cubaine avec ce programme.
Un programme pour défendre et étendre les conquêtes de la révolution
Si au debut des années 1990 la restauration du capitalisme dans la ex-URSS, l’Europe de l’Est et la Chine a renforcé l’offensive néoliberal en approfondissant le recul de la capacité d’organisation et lutte de la classe ouvrière, ainsi que la crise de la perspective de la révolution sociale, le triomphe de la restauration capitaliste en Cuba signifierait sans aucune doute un échec de grande envergure pour les travailleurs, les paysans et les secteurs exploités de la région et il ouvrira les portes ã une politique plus agressive de l’impérialisme
La seule forme d’éviter cette perspective est de lutter pour une révolution politique des travailleurs, alliés aux paysans et aux secteurs populaires, qui, partant de la défense des conquêtes de la révolution, défaite le blocage impérialiste et mette un fin à la bureaucratie et ses privilèges. Cette révolution est intimement liée aux perspectives de la révolution sociale dans tout le continent.
Les révolutionnaires ne peuvent pas laisser que l´impérialisme, les « gusanos » et la dissidence pro-capitaliste comme celle des « Damas de blanco », s´emparent démagogiquement des drapeaux des droits humains et de la situation des dits « prisonniers politiques » pour leurs buts réactionnaires. Contre les abus et les accusations arbitraires du régime castriste, nous nous prononçons pour la constitution de commissions ouvrières et paysannes indépendantes et pour la liberté des prisonniers politiques qui ne sont pas liés aux actes de terrorisme ou parrainés par la CIA, sans aucun type de solidarité avec leurs positions politiques. A la fois, nous nous prononçons pour la liberté immédiate des cinq cubains en prison aux Etats-Unis, auxquels l´impérialisme utilise comme des otages et comme une partie de son chantage.
Le régime de parti unique implique qu’il ne peut pas exister aucune organisation politique légale sauf le Parti Communiste, ni les organisations syndicales ou sociales qui ne répondent pas à l’appareil du parti. De cette forme on interdit tous les organisations indépendantes des travailleurs, alors qu’on laisse la route libre à l´organisation de l’Eglise Catholique qui n’est que l’avant-garde de la restauration capitaliste, un rôle qu’elle a dejà joué en Pologne aux années ’ 80, où, après avoir contribué pendant de décennies avec le régime bureaucratique ã maintenir les conditions d´oppression des travailleurs, elle a été un des piliers de la restauration.
La direction officielle de la centrale syndicale, la CTC, est chargée que les travailleurs acceptent les conditions imposées par la bureaucratie. Même elle est arrivée au comble d´être chargée de l´annonce du plan de reduction des postes de travail à l´Etat dans un communiqué public, où elle reproduit les concepts du régime, hostiles aux travailleurs et à la tradition égalitaire qui a accompagnée à la révolution cubaine.
Les révolutionnaires, nous luttons pour les droits de réunion, d’expression et l’organisation syndicale des travailleurs cubains, indispensables pour faire face ã cette attaque aux conditions de vie et d’emploi. L’expérience de Solidarité en Pologne dans les années 1980-81, a montrée que les syndicats peuvent jouer un rôle central dans l’organisation de la lutte de la classe ouvrière pour faire face aux mesures de la bureaucratie gouvernante, mais qu’ils peuvent aussi avoir une direction qui accompagne la restauration capitaliste, bien que son programme se présente sous la forme d’autogestion ouvrière comme alternative à la planification bureaucratique.
Même à l’intérieur du PCC ont surgi des secteurs critiques de la bureaucratie qui sont pour l’autogestion patronale et l’introduction de certaines mesures de marché comme correction aux problèmes économiques, en récréant dans un certain sens, un programme similaire ã celui de la Perestroïka russe.
Cependant, ce programme d’autogestion, au lieu de démocratiser les relations de production, détruit les mécanismes de planification et encourage le développement de la concurrence et les tendances capitalistes à l’accumulation de la part des directeurs et des gérants des entreprises au détriment de l’organisation de l’économie de l’ensemble, ce qui, finalement, loin de faciliter le contrôle des travailleurs sur la production, finit par favoriser aux secteurs de la bureaucratie qui sont pour la restauration.
C’est pourquoi il faut lutter, dans les syndicats et dans les organisations d’auto-détermination ouvrière et populaire qui peuvent surgir éventuellement dans la lutte, pour un programme qui parte de la défense de la nationalisation et la centralisation des principaux moyens de production comme condition pour faire face à la restauration du capitalisme et pour planifier démocratiquement l’économie.
Contre le régime bureaucratique de parti unique et contre le programme d’établir une démocratie bourgeoise parlementaire, nous luttons pour faire tomber le régime bureaucratique et pour construire un état ouvrier révolutionnaire basé sur des conseils des travailleurs, des paysans et des soldats, et pour la pleine légalité des partis qui défendent les conquêtes de la révolution et de ceux qui se revendiquent anti capitalistes.
La première tâche de ces conseils d’ouvriers, paysans et soldats, appuyés sur des milices populaires, est de retourner en arrière les mesures d´austérité, comme les licenciements et les réductions de bénéfices tels que les restaurants ouvriers, de réviser exhaustivement et radicalement les mesures adoptées pendant la "période spéciale" et le gouvernement de Raoul, y compris les concessions au capital étranger, et d´orienter l´économie en profit des intérêts de la révolution et des travailleurs, les paysans et les masses populaires cubaines, établissant une planification démocratique de l’économie.
C’est pour cela il est indispensable le contrôle ouvrier de la production et des entreprises, aujourd’hui contrôlées par la bureaucratie et le haut commandement des FAR ; finir avec les privilèges de fonctionnaires de l’Etat et toute la bureaucratie, en permettant ainsi une augmentation générale du salaire ouvrier qui, avec l’élimination de la dualité monétaire, diminue les inégalités sociales ; et de récupérer pleinement le monopole du commerce extérieur, détruit pendant les dernières décennies, pour combattre les fortes pressions du marché mondial capitaliste.
Pour réaliser ce programme, il est nécessaire la construction d’un parti ouvrier révolutionnaire internationaliste c’est-à-dire trotskiste, qui fasse face ã toutes les fausses options qui se présentent au prolétariat cubain, tant de l’impérialisme que de la propre bureaucratie gouvernante.
Le Parti Communiste Cubain compte sur la négociation et les bons métiers des "gouvernements amis", comme le gouvernement capitaliste de Lula ou celui de Chávez et il parie que le gouvernement d’Obama finisse par ouvrir un canal de dialogue pour négocier la levée du blocage en échange de l’introduction graduelle de "réformes" procapitalistas. Nous sommes contre tout dialogue ou négociation avec les « gusanos » et l´impérialisme. Face ã cette politique qui portera à l’échec, nous disons que les alliés du peuple cubain dans sa lutte contre l’impérialisme et le blocage sont les travailleurs et paysans d’Amérique latine et non les bourgeoisies de la région, alliées à l’impérialisme. Nous appelons aux masses exploitées et opprimées latino-américaines et de tout le monde, ã exprimer sa solidarité active avec le peuple cubain contre l’impérialisme et les tentatives de restauration capitaliste, pour qu’une fois de plus Cuba soit la source d´inspiration de lutte dans tout le continent et elle devienne un moteur de lutte pour la révolution socialiste internationale.
Une fois de plus sur le caractère de la revolution cubaine
La révolution de 1959 a réveillé l’enthousiasme et la sympathie des travailleurs, les paysans, les jeunes et opprimés d’Amérique latine et du monde. Il a signifié la conquête du premier état ouvrier du continent ã très peu de kilomètres de l’impérialisme américain. Après l’échec de la révolte ouvrière de la décennie de 1930 et la politique collaboratrice avec la dictature du parti stalinien, la direction politique de la lutte contre la dictature de Batista, qui commença avec la prise manquée du Moncada, a été hégémonisée par le M26 et la guérilla, dont le programme était celui d’une "révolution démocratique" et la conciliation avec la bourgeoisie et non l’établissement d’un état ouvrier basé sur l’autonomie des masses ã travers les organes de type soviétique. Ceci explique que seulement après l’invasion manquée de la Baie des Cochons, armée par la CIA en 1961, Fidel Castro ait déclaré Cuba comme un "état socialiste" et que l’état ouvrier cubain est né bureaucratiquement déformé, avec un régime basé non sur des organes de démocratie ouvrière mais sur l’appareil de l’Armée Rebelle et du M26, et tout de suite sur le Parti Communiste Cubain.
Au début des années 1960, après un processus prolongé de luttes internes et des purges de dirigeants provenants du vieux PSP et du Mouvement 26 Juillet, Fidel Castro a consolidé son hégémonie à l’intérieur du parti, qui en 1965 adoptera le nom de Parti Communiste. Depuis lors, le PCC a monopolisé le domaine de l’état, en établissant une dictature bonapartiste, un régime de parti unique qui a interdit toute organisation qui échappait ã son contrôle, soit syndicale, sociale ou politique, et il a développé une vigilance stricte idéologique et politique sur la population, au moyen des CDR (des Comités de Défense de la Révolution), devenus des organes tutélaires au service du régime et d’appareils étatiques de sécurité.
La bureaucratie gouvernante a été consolidée comme une couche avec des privilèges matériels, surgis du contrôle de l’appareil de l’état. Après quelques différences initiales, surtout après la crise des missiles, Fidel Castro s’est complètement aligné avec la politique extérieure de l’Union Soviétique. La Cuba a établi une relation de dépendance économique avec l’ex-URSS qui, même si elle lui permettait de se soutenir et de résister au blocage et à la politique américaine qui cherchait à l’isoler d’Amérique latine, a renforcé une structure productive basée sur la monoculture de la canne ã sucre. Le régime cubain a fini par copier le modèle de parti unique de la bureaucratie stalinienne soviétique et par adopter sa stratégie de "socialisme dans un seul un pays".
La subordination du régime cubain ã Moscou s’est renforcée par la mort du Che Guevara et elle a compris l’appui de Fidel à l’entrée des tanques russes qui ont réprimé au "Printemps de Prague" en 1968 ainsi que le coup contre Solidarité en Pologne en 1981.
En Amérique latine, cette subordination à la politique de l’URSS qui poussait la politique de "coexistence pacifique" et la conciliation de classes avec la bourgeoisie, a signifié par exemple, adhérer à la "route pacifique vers le socialisme" qui a emmené à l’échec le processus révolutionnaire au Chili ; ou ã appuyer le processus contre-révolutionnaire de "pacification" yankee en Amérique centrale dans les années ’80 ã travers lequel le processus révolutionnaire a été liquidé dans cette région. De cette façon, bien que la révolution cubaine éveillait et réveille une énorme sympathie parmi les masses exploitées et opprimées du continent et elle est un exemple pour toute la région, le PCC n’a jamais eu la politique de transformer Cuba en moteur de la révolution socialiste l’Amérique latine.
Le débat économique y la politique de Guevara
Dans les premières années de la révolution, la subordination à l’égard de la bureaucratie stalinienne de l’Union Soviétique a été partiellement mis en question par le Che Guevara, tout en continuant ã faire partie de la direction du M26 (et après du PCC) et en étant Ministre de l’Industrie du gouvernement cubain. Ces différences se sont exprimées dans le dénommé "grand débat économique" de 1963-64 (duquel même Ernest Mandel a fait partie), dans lequel il s’est opposé à l’orientation connue comme "calcul économique" basée sur les fondements de la réforme Liberman en Union soviétique qui cherchait ã réintroduire des méthodes capitalistes de production, comme l’autofinancement des entreprises étatiques, la concurrence entre des unités productives et la faillite, pour augmenter la productivité de l’économie. Contre cette orientation, poussée par l’aile plus ouvertement pro Russe, le Che a défendu la centralisation et la planification de l’économie.
De plus, il a soutenu la nécessité d’avancer peu ã peu dans l’industrialisation du pays, en réassignant les recours provenants des exportations du sucre, pour ainsi dépasser la condition historique dépendante de l’économie cubaine basée sur la monoculture de sucre, alors que l’aile stalinienne lors du débat théorique a eue comme plus important exposant l’économiste français Charles Bettelheim, qui poussait Cuba ã être exclusivement fournisseur de sucre du "bloc socialiste" conformé par l’URSS et les états de l’Est européen dans le contexte d’une supposée "division socialiste internationale du travail".
Dans le plan politique, Guevara s’est opposé ã soutenir la ligne de "coexistence pacifique" avec l’impérialisme poussée par la bureaucratie de l’Union Soviétique et par Mao Tse Tung, et à la stratégie de conciliation de classes, soutenue par les partis communistes au niveau international qui menait à la subordination de la classe ouvrière aux bourgeoisies décadentes nationales.
Il a aussi dénoncé les privilèges que les fonctionnaires du régime avaient commencé ã accumuler, auxquels il accusait de contre-révolutionnaires, et la formation d’une bureaucratie du partit et étatique.
Finalement, en 1965 Guevara a renoncé ã toutes ses postes politiques et il est parti de Cuba pour mener sa politique d’étendue internationale de la révolution basée sur l’action des guérillas et des armées populaires, d’abord au Congo et après en Bolivie où il a été exécuté par les troupes de l’armée locale et des Rangers nord-américains.
Contre la théorie de la révolution par étapes et la collaboration avec la bourgeoisie nationale, Guevara a correctement posé que l’alternative était une "révolution socialiste ou une caricature de révolution" ce qui le rapprochait d’une stratégie conséquente de révolution socialiste internationale. Mais malgré ses critiques, elle n’a pas été une alternative au régime de parti unique du PCC parce que son programme n’était pas de développement de la démocratie ouvrière basée sur des conseils des ouvriers, de paysans et de soldats.
Le Che avait une conception stratégique de guerrilla et foquiste de la révolution, dont la conséquence était la construction de partis-armées basés sur la paysannerie et non sur la classe ouvrière. Son "antiimpérialisme conséquent", exprimé dans son appel de créer "deux, trois, plusieurs Vietnam" ne considérait pas comme un aspect stratégique l’alliance avec les grands bataillons du prolétariat des pays avancés. La tentative manquée en Bolivie a montré les limites de sa stratégie. Peu de temps après sa mort, la montée ouvrière qui a compris les centres impérialistes, les états ouvriers burocratisés et les pays semi-coloniaux, a montré que sa stratégie de guerrilla et la supposition selon laquelle la révolution allait "de la campagne à la ville" était incorrecte.
Le colectivisme burocratique, le capitalisme d’Etat et la théorie de l’Etat “ni ouvrier ni bourgeois”
Face à la dégénérescence stalinienne de l’Union Soviétique, deux courants sur tout ont surgi -le collectivisme bureaucratique et le capitalisme d’État- lesquels ont proposé des définitions alternatives à la définition de Trotsky de l’URSS comme un état ouvrier dégénéré, sur laquelle nous nous basons les marxistes révolutionnaires pour considérer Cuba comme un état ouvrier déformé.
Le collectivisme bureaucratique affirmait que la bureaucratie stalinienne s’était transformée en une nouvelle classe exploiteuse, même plus efficace que la propre bourgeoisie, même si elle ne possédait pas les moyens de production mais que seulement elle les administrait par sa position dans le contrôle étatique.
Le capitalisme d’État, dont le référant principal est le SWP britannique, soutenait que le capitalisme avait été déjà restauré en Union Soviétique en 1928 et que la bureaucratie était garante de l’accumulation capitaliste. Cette définition du caractère de classe de l’État soviétique a mené ã ces courants ã adopter une posture antidefensiste de l’Union Soviétique dans la Deuxième Guerre Mondiale, et ã abandonner programmatiquement la défense de la propriété nationalisée comme base d’un programme de révolution politique pour renverser la bureaucratie.
L´effondrement des régimes staliniens de 1989-1991 a laissé au nu que les deux théories étaient absolument fausses. La transformation de secteurs de la bureaucratie en capitalistes, ã partir du vol de la propriété publique, a démontré, contre la conception collectiviste bureaucratique, que la bureaucratie n’était pas une nouvelle classe sociale, mais une couche différenciée dont les privilèges surgissaient de l’administration de l’état et que son programme était de se transformer en propriétaires des moyens de production.
De leur côté, les partisans du capitalisme d’État sont dans la difficile situation d’avoir ã justifier théorique et politiquement que la restauration du capitalisme à la ex-URSS, en Europe de l’Est et en Chine n’a pas produit aucun changement historique et qu´elle n´était pas un grand échec, parce que ces états étaient déjà capitalistes et seulement ont subi un changement de "modèle" d’un capitalisme étatique ã un capitalisme privé.
Ce courant s’est démontré complètement stérile et il a été incapable de poser qu’il y avait une alternative pour affronter la bureaucratie restauracioniste, après avoir refusé depuis 1930 à lever un programme de révolution politique.
Malgré le fait que ces théories alternatives ont été démontrées incorrectes et ont mené ã claudiquer du point de vue programmatique aux plans de restauration capitaliste, aujourd’hui le Nouveau MAS argentin, en révisant tardivement la conception "objectiviste" de Nahuel Moreno, a adopté une théorie subjectiviste qui l’a mené ã postuler de nouveau l’existence d’États "bureaucratiques", sans aucun contenu défini de classe, surgis des révolutions "anti-impérialistes" et "anticapitalistes", qui en n’ayant pas été dirigé par des partis ouvriers revoultionnaires et qui en n’ayant pas dévelloppé des organes de démocratie ouvrière, même s’ils ont expropié la bourgeoisie ne constituent pas d’Etat ouvriers deformés. Pour le Nouveau MAS, ce ne sont pas les directions petites bourgeoises et/ou staliniennes nationales, mais les mêmes révolutions d’après-guerre et les états surgis d’elles basés sur l’expropriation et la liquidation des capitalistes, n´ouvraient aucunement la possibilité de la transition au socialisme, bien qu’il les considère étrangement comme formations sociales "progressives".
Dans le cas de Cuba, le Nouveau MAS, prenant quelques concepts de S. Farber, invente une théorie curieuse dans laquelle la direction du Mouvement 26 Juillet et de la guérilla n’avait aucun caractère de classe et que l’expropriation de la bourgeoisie a été résultat des caractéristiques de "chef populiste" de Fidel Castro.
Le Nouveau MAS oublie que le Mouvement 26 Juillet, comme aile gauche du nationalisme petit bourgeois radical de la Jeunesse Orthodoxe, exprimait l’ampleur de la radicalización des couches moyennes de la société, qui après avoir vu fermé tout espace légal de participation électorale, se sont consacrées à la lutte armée contre la dictature de Batista. Ceci s’exprimait dans l’existence de différentes organisations armées surgies essentiellement du mouvement d’étudiants et des classes moyennes urbaines, auxquelles des secteurs paysans s’incorporent tout de suite. Alors que la classe ouvrière, qui avait subi un échec important au début de la décennie de 1930, restait dirigée majoritairement par le stalinien Parti Socialiste Populiare qui collaborait avec la dictature.
Bien que déjà en 1955 les travailleurs concentrés dans le secteur sucrier ont protagonisé une grève importante qui a pris un caractère politique et à la fin de 1958, les cinq jours de grève permettent de finir de disloquer l’état bourgeois et l’entrée triomphale des colonnes de guerrilleros le 1 janvier 1959, la classe ouvrière cubaine n’a jamais joué de rôle hégémonique dans la révolution dirigée par un parti-armée petit-bourgeois, avec un programme limité de réforme agraire et de récupération de la démocratie.
Alors que, pour le Nouveau MAS, basé sur des considérations sociologiques abstraites, la révolution cubaine viendrait ã confirmer une théorie de "révolution n’importe laquelle" qui finit par entraîner un état "bureaucratique" sans aucun contenu social précis, pour les marxistes, cette révolution n’a fait que confirmer la mécanique de la révolution permanente : effectivement, le programme petit-bourgeois nationaliste radical du Mouvement 26 Juillet s’est montré complètement utopique et très rapidement, avec la pression impérialiste et d’un mouvement de masses encouragé par le triomphe obtenu, il s’est vu obligé d’exproprier le capital américain, les propriétaires fonciers et la bourgeoisie locale, et ã établir le monopole du commerce extérieur c’est-à-dire ã établir une économie de transition bien que bureaucratiquement planifiée.
Par sa conception subjectiviste, le Nouveau MAS est incapable de reconnaître que la liquidación des classes exploiteuses et la nationalisation des moyens de production, même si elles ne signifient pas le socialisme en soi même, c’est sa condition nécessaire. Cest pour cela que le Nouveau MAS esta partidaire d’une “nouvelle révolution” au lieu de mener un programme conséquent de revolution politique pour l´île.
28/9/2010
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