Par Juan Chingo
La progression importante du FN est un avertissement pour tous les militants et les électeurs d’une gauche véritable. C’est un avertissement pour tous les militants d’extrême gauche. Les problèmes que pose la construction d’une force ouvrière contre-hégémonique, face au duo UMP-PS -animateur de l’offensive néolibérale et désormais de l’austérité- sont d’une énorme importance pour les futurs combats du monde du travail ; et cela quel que soit le vainqueur du deuxième tour.
Un Front de Gauche qui reste dans le cadre du régime
Malgré sa rhétorique et ses symboles, le Front de Gauche (FdG) n’est qu’un parti politique s’inscrivant dans le cadre d’une démocratie bourgeoise impérialiste dégradée.
Le FdG s’est présenté comme une variante plus radicale que la gauche institutionnelle, c’est-à-dire le PS. Son objectif serait de créer un meilleur rapport de forces sur le terrain électoral pour changer la dynamique du parti de François Hollande. Mais comment le FdG peut-il être une alternative crédible s’il se contente de chercher ã faire pression sur un centre-gauche néolibéral ? Comment influencer un PS co-responsable depuis les années 1980 de la contre-offensive libérale en France, et qui accompagne les mêmes décisions ailleurs en Europe et dans le monde -que ce soit le New Labour en Grande-Bretagne, le SPD allemand, sans même parler des socialistes grecs et espagnols ? Le courant de Mélenchon, malgré quelques coups de canif contre Hollande, est subordonné au « camp de la gauche ». Cela est vrai, que Mélenchon et les siens intègrent, ou non, un futur gouvernement dominé par le PS. Or, « le camp de la gauche institutionnelle » n’est plus perçu depuis longtemps comme une alternative électorale pour les secteurs relégués de la classe ouvrière et les secteurs paupérisés des classes moyennes. C’est notamment le cas des zones ouvrières et industrielles. Il suffit de regarder une carte électorale de la Moselle où, dans les circonscriptions ouvrières et populaires, c’est le FN qui a capitalisé l’anti-sarkozysme.
Le fait que Mélenchon soit un homme politique avec une longue trajectoire dans les institutions bourgeoises fait de lui un politicien parmi tant d’autres, et ce par-delà sa rhétorique contre ses collègues socialistes, la droite ou les journalistes. Il a commencé sa carrière comme directeur de cabinet du maire de Massy en 1978. Il a été par la suite conseiller général en 1985, sénateur en 1986, sous-ministre, délégué à l’enseignement professionnel, en 2000, avec la Gauche plurielle. En outre, ses « pères spirituels en politique » ne sont ni plus ni moins que Mitterrand et Jospin, responsable du tournant néolibéral en France après la crise des années 1970 pour le premier, et chef du gouvernement qui le plus privatisé dans l’histoire de la Vème République pour le second. Autre ombre au tableau… il a même voté le traité de Maastricht. Aux yeux des secteurs populaires tentés par le voté FN, le PS -avec lequel Mélenchon a si longtemps frayé, au point d’en être un responsable de premier plan- est synonyme de régression sociale, associé au système actuel de fausse alternance.
Son « radicalisme verbal » ne peut occulter le fait que Mélenchon n’est en aucune façon une alternative radicale ã ce que l’intellectuel de gauche anglo-pakistanais Tariq Ali appelle « l’extrémisme du centre », ce « centre qui englobe le centre-gauche, le centre-droit et les partis traditionnels du centre de l’échiquier politique, [qui] fait la guerre, soutient l’occupation militaire d’autres pays, déclare la guerre ã son propre peuple ã travers les politiques d’austérité, [tout ceci] devient un extrémisme pur. (…) C’est-là la tendance dominante dans la plupart des pays d’Europe. Peu importe qui gagne, c’est le centre qui gouverne. Et cela est en train de créer un grand vide de légitimité » [1]. Face ã cette tendance profonde du panorama politique et social, la tentative de recyclage politique de deux vieilles variantes réformistes -le post-stalinisme, avec tout son bagage stratégique réformiste ainsi que la tradition social-démocrate et républicaine incarnée par Mélenchon- est incapable de créer de l’enthousiasme au sein de fractions de l’électorat populaire et ouvrier, totalement désespérés par la crise, et qui cherchent une issue radicale. En l’absence d’une véritable alternative antisystème ã gauche, ces derniers finissent, pour certains, par exprimer leur colère ã travers le vote FN [2] ou l’abstention, fatigués d’un jeu politique qui les conduit à la démoralisation. Autrement dit, l’absence d’une véritable alternative révolutionnaire contre le système -dont le renforcement relatif du FdG comme option réformiste tend ã bloquer la construction- ne permet pas la création d’une alliance des exploités contre la France des Bolloré, des Peugeot, des Bettencourt, des Michelin et autres Serge Dassault, marchand de canons et d’avions invendables, sénateur UMP et grand ami de Mélenchon [3].
Avec la crise, le FN, variante politique bourgeoise nationaliste et xénophobe, est passé du traditionnel discours néolibéral et poujadiste de Jean-Marie Le Pen ã un discours plus étatiste et social-démagogique dont s’est fait l’écho Marine Le Pen au cours de la campagne. Que ce discours puisse pénétrer chez les travailleurs, notamment ceux qui sont les plus exposés à la crise et ses conséquences, n’est pas simplement l’expression de l’exaspération sociale. C’est aussi la responsabilité des directions historiques et actuelles du mouvement ouvrier qui ont inculqué l’idée d’une priorité de la défense des intérêts nationaux par rapport ã ceux de la classe ouvrière.
C’est le Parti Communiste (PCF) qui a commencé ã défendre le fameux « produire français ». Ce sont les directions syndicales actuelles qui présentent tout le temps la défense de l’emploi non pas du point de vue des intérêts de classe mais du vue du capitalisme hexagonal. Ce sont elles, par exemple, qui dénoncent le danger encouru par la sidérurgie ou le raffinage « français », au lieu de mettre l’accent sur la défense inconditionnel des sites et des entreprises du point de vue des salariés. Autrement dit, la tentation du protectionnisme, du « produire français » est très forte et semble être une solution immédiate et crédible pour nombres d’électeurs. Or, qui mieux que le FN n’incarne mieux cette pseudo-solution, avec la « préférence nationale » en prime ?
Le républicanisme de gauche de Mélenchon ne rompt pas radicalement avec le schéma nationaliste. Il ne pouvait pas en être autrement étant donné sa posture de politicien responsable, incarnation d’un Etat protecteur et d’une nation française, phare du monde civilisé… C’est ce qu’a démontré ã plusieurs reprises la campagne du FdG. Même lorsque Mélenchon a défendu l’apport de l’immigration, notamment de l’immigration maghrébine, dans notre histoire, il l’a fait d’un point de vue nationaliste. Son universalisme, qui est tout l’inverse de l’internationalisme ouvrier, n’est que le reflet d’une soi-disant « exception française », pleine de fierté. Lors du meeting de Toulouse le 5 avril dernier Mélenchon n’a pas hésité ã déclarer que « la France n’est pas une nation occidentale. Elle ne l’est ni du fait de son peuple bigarré, ni du fait qu’elle est présente dans tous les océans du monde, du fait qu’elle est, existe, vit et rayonne ã proximité des cinq continents, de la Nouvelle Calédonie, la Polynésie, la Réunion, Mayotte, les Caraïbes, la Guyane... Non, la France n’est pas une nation occidentale, elle est une nation universaliste ». Dans les faits, cela revient ã revendiquer l’héritage du colonialisme français, avec son cortège de massacres et de pillages. C’est l’opposé des valeurs internationalistes dont est porteur le mouvement ouvrier. C’est la parfaite négation d’une politique radicalement anticoloniale et anti-impérialiste dont le mouvement ouvrier organisé devrait être le porte-voix. Il ne suffit pas de s’opposer à l’impérialisme nord-américain -comme pouvait le faire De Gaulle partiellement d’ailleurs- mais combattre avant tout « notre » propre impérialisme, celui de l’Etat français, pour le renverser. Et l’exaltation de la Méditerranée par Mélenchon dans le discours de Marseille ne peut pas occulter son vote au Parlement européen pour la guerre en Libye, et sa volonté de poursuivre avec les pressions contre la Syrie et en Iran, sans même parler de son attachement à la puissance militaire française, y compris à la dissuasion nucléaire hexagonale.
Enfin, la lutte qui se profile entre le PCF -qui essaye de s’aligner derrière le PS pour maintenir son groupe parlementaire- et le Parti de Gauche -qui a été exclu de toute négociation de couloirs entre le PS et le PC pour décider d’éventuels maroquins ministériels ou de présidences de commissions parlementaires - ne peut qu’engendrer du dégout dans les classes populaires qui voient ã juste titre les politiciens professionnels comme une caste éloignée de leurs intérêts et de leurs préoccupations ; ces politiciens qui se servent de la politique pour faire des affaires ou placer leurs proches alors que les travailleurs et la jeunesse voient leurs conditions de vie se dégrader. Ces pratiques permettent au FN d’adopter une rhétorique antisystème que les frontistes exploitent pour faire avancer leurs idées réactionnaires.
Il est évident que la plupart des électeurs de Mélenchon cherchent une alternative de gauche au PS. Le problème néanmoins, c’est que sans dépassement des limites du projet du FdG, la construction d’une force contre-hégémonique ouvrière et populaire contre le bipartisme de la Vème République est impossible. C’est ce qui donne du mou au FN, c’est ce qui lui permet de se présenter comme une alternative de droite face ã ce régime décomposé et réactionnaire. C’est là un danger qu’il nous faut collectivement affronter.
Philippe Poutou, un bon candidat, mais orphelin de parti
Dans ce cadre, Philippe Poutou a montré ses qualités comme candidat. Il a montré comment pouvait porter la voix d’un travailleur du rang, exprimant réellement les besoins et les préoccupations des classes populaires, de la jeunesse et des salariés. Malgré tous les obstacles, et grâce aux efforts des militants du NPA pour obtenir les 500 parrainages, son discours a porté, notamment à la fin de la campagne. C’est-là une grande réussite.
Mais si le discours de Philippe n’a pas eu plus d’écho et surtout s’il n’a pas réussi ã engranger plus de soutiens, ce n’est pas parce que sa candidature aurait véhiculé une image « soixante-huitarde » ou « ouvriériste » comme ont pu le dire certains. La raison, c’est surtout parce que sa candidature a souffert du manque d’appui dans le parti. Les premiers responsables en sont les dirigeants du courant liquidateur du NPA, comme Myriam Martin, ex-porte-parole, ou Pierre-François Grond, membre du Comité Exécutif. Impressionnés par la dynamique électorale du FdG, ils ont déserté le NPA pour aller soutenir ouvertement Mélenchon [4]. Mais à l’inverse de ce que pouvait leur laisser prévoir leur aveuglement opportuniste, la « dynamique » autoproclamée du FdG a montré ses limites : loin des 15% annoncés par certains sondages, ce creuset de voix, à la gauche du PS, relativement stable depuis 1995, les bulletins Mélenchon expriment essentiellement un transfert de voix de l’extrême gauche trotskyste vers un regroupement réformiste. Voilà toute la dynamique ! Grond et Marin ont apporté leur pierre ã ce bien triste édifice. Cela devrait servir de leçon ã tous ces courants de gauche radicale comme la Gauche Unitaire de Christian Piquet ou Convergence et Alternative (tous deux dans le FdG) ou bien la Gauche Anticapitaliste, dont une partie se trouve encore à l’intérieur du NPA et a saboté la campagne de Poutou, en arrivant même ã souhaiter que celle-ci soit un échec pour ne pas rompre la « dynamique et la magie » mélenchonienne… Mais ce qui démontre que la dérive de ces secteurs va au-delà d’une simple « erreur d’appréciation » c’est le fait qu’après les résultats du premier tour ils continuent ã encenser la candidature de Mélenchon et son « score honorable », pour utiliser la formule de Grond (qui ne s’est pas privé d’enfoncer au passage celui de Philippe Poutou). Voilà qui semble en complète contradiction avec la déception des électeurs et des sympathisants du FdG quand ils ont su les résultats.
Si la campagne de Poutou n’a pas été plus puissante, par delà les 410.000 suffrages qui se sont portés sur sa candidature, ce n’est pas ã cause des faux motifs énoncés par ceux qui ont préféré se mêler aux anti-néolibéraux. C’est aussi et avant tout dans la mesure où cette candidature, malheureusement, n’a pas été l’expression d’un courant d’ouvriers révolutionnaires qui auraient pu entrer au NPA, notamment à l’occasion des vagues de grèves dures de 2009 ou lors du combat de l’automne 2010 contre la réforme des retraites. Ces ouvriers et salariés, qui ont été à la pointe de ces luttes, ne sont pas entrés au NPA, pas plus d’ailleurs que le NPA n’a recruté massivement dans la jeunesse... En ce sens, le profil de Poutou, militant d’extrême gauche de longue date d’ailleurs, est plutôt un cas isolé dans le NPA, tout comme son rôle dans un conflit ouvrier -chez Ford-Blanquefort en l’occurrence. Depuis sa fondation l’axe du NPA n’a pas été de se structurer dans les principaux bastions de la classe ouvrière industrielle et dans les services. Ça a été au contraire de mettre l’accent sur le terrain « magique » des élections. C’est ce qui aujourd’hui se retourne contre le parti, avec la montée du FdG. Mais de toute façon, les limites du phénomène Mélenchon tout comme, sur un autre registre et avec une autre portée, du phénomène Besancenot et la création du NPA, montrent combien un succès électoral est insuffisant pour construire un projet politique contre-hégémonique. En effet, pour ce faire, cet outil doit être l’expression d’un changement de l’état d’esprit et de la combativité des masses.
C’est ainsi que l’on peut comprendre les faiblesses de la campagne de Poutou et pourquoi Mélenchon a pu canaliser les voix à la gauche du PS. Quand à l’automne 2010, les travailleurs, mais pas seulement, la jeunesse scolarisée, les lycéens, faisaient montre de leur volonté de se battre jusqu’au bout contre Sarkozy et sa réforme des retraites, toute cette énergie a été canalisée par les directions syndicales qui l’ont transformée en une vaste lutte de pression sur le gouvernement, afin de chercher négocier ce qui n’était pas négociable. Ce qu’il y a peut-être de plus tragique, c’est que face au rôle joué par les directions syndicales, ni le NPA ni le reste de l’extrême gauche, à l’image de Lutte Ouvrière, n’ont été capables d’offrir une alternative réelle à la politique de conciliation avec le régime. L’extrême gauche n’a pas dénoncé l’orientation des directions syndicales afin de les démasquer face l’avant-garde. Même si dans certaines luttes ou bien localement, la stratégie frontiste est de rentrer dans les syndicats, on sait bien entendu que sur le combat des retraites, le FN a brillé par son absence. On sait également qu’au moment de l’affrontement le plus aigu entre les travailleurs et le gouvernement, lorsque la grève des raffineurs menaçait de paralyser le pays, Marine Le Pen appelait à la « tolérance zéro » contre les « émeutiers ». Cela ne l’a pas empêché, cependant, en suivant une logique démagogique et réactionnaire, de déclarer en plein mouvement que « cette réforme des retraites, elle est déjà dealée entre les syndicats et l’Etat… Qu’il s’agisse des syndicats d’ouvriers, de pêcheurs ou d’agriculteurs, on s’aperçoit ã chaque fois que ces gens sont là pour canaliser la colère. Ils font mine de défendre les salariés et puis ils acceptent quelques miettes du gouvernement et disent ‘halte au feu, on a obtenu ce qu’on voulait’ » [5].
A la même époque, la direction du NPA se satisfaisait uniquement du fait que les militants soient dans la grève « comme des poissons dans l’eau ». A aucun moment la direction du parti n’a fait quoi que ce soit afin de transformer les éléments les plus avancés du mouvement -déclaration des syndicalistes pour la grève générale, les différentes assemblées interprofessionnelles telles qu’elles ont pu voir le jour, comme celle du Havre notamment- afin d’exiger de l’Intersyndicale qu’elle respecte le mandat de la rue, ã savoir « grève reconductible jusqu’au retrait de la réforme, ã bas Sarkozy-Woerth ! » et avancer ainsi vers la grève générale. Ce n’est que sur la toute fin que quelques critiques en direction de l’Intersyndicale ont été formulées. Le cas de LO est encore plus problématique dans un sens. L’organisation de Nathalie Arthaud a toujours jugé les directions syndicales plutôt en phase avec l’état d’esprit du mouvement. Mélenchon, de son côté, avait le mérite d’être clair. Il fallait selon lui, « suivre les syndicats, suivre les syndicats, suivre les syndicats ! » et exiger, ã un niveau institutionnel, un référendum…
Le NPA est en train de payer aujourd’hui le prix de ces insuffisances politiques, liées à la conception stratégique d’un parti large, sans délimitation de classe et basé sur un programme ambigu. Cela ne sert ã rien de se plaindre comme le fait Samy Joshua dans son bilan de la campagne électorale, notamment lorsqu’il dit qu’il « eût fallu appeler ã un gouvernement de combat, [et qu’à l’inverse le] camarade Poutou, lui, renvoyait les gens à leur impuissance en annonçant qu’il ‘s’auto-dissoudrait’ en cas d’élection » [6]. Joshua, avec l’ensemble de la direction de l’ancienne Ligue Communiste Révolutionnaire, a pourtant bien décidé de dissoudre l’héritage trotskiste, pour construire un parti sans « hypothèse stratégique ». Ce faisant, il liquidait ce que les expériences du mouvement ouvrier avaient réussi ã produire en termes d’acquis stratégiques : le lien indissoluble entre les moyens stratégiques (la dictature du prolétariat, ou pour le dire plus autrement, le gouvernement des travailleurs par les travailleurs, impliquant la dissolution de l’Etat bourgeois) et le but ou la « fin politique » (la société sans classes, c’est-à-dire le communisme).
Résoudre cette impasse stratégique est l’unique façon pour le NPA de trouver une sortie par le haut de la crise que le parti traverse. Cela ne peut en aucun cas passer, comme le propose Joshua, par la construction d’une « nouvelle formation avec tous les anticapitalistes […] à l’intérieur d’un large bloc unitaire, politique et social, contre l’austérité de droite (si malgré tout Sarkozy parvient à l’emporter) comme de gauche ». Une telle politique va dans le sens d’un bloc stratégique avec les réformistes et se situe aux antipodes de la tactique du front unique ouvrier, ã savoir « marcher séparément, frapper ensemble ». Selon Joshua, un tel bloc serait utile à la lutte contre le Front National. Mais comment peut-on envisager le combat contre le poison nationaliste et réactionnaire dans le cadre d’un front politique permanent avec le FdG, un courant qui, selon Joshua lui-même, tire un « coup de chapeau ã ‘la présence de la France’ sur tous les continents (autrement dit les dernières colonies), à la politique des États à la manière gaullienne, ã une alliance directe avec ces belles démocraties que sont la Chine et la Russie, la vente sans scrupules d’armes ‘françaises’, le maintien de la dissuasion nucléaire, les tentations fluctuantes sur le protectionnisme » ?
Alors que le terrain sur lequel le FN se construit est précisément celui de l’absence d’une alternative radicale de gauche au régime, la proposition de Joshua et de la direction du courant Gauche Anticapitaliste nous amènerait ã dissoudre notre programme dans celui d’une formation qui se situe dans le cadre de ce même régime, qui ne remet pas en cause les bases du système capitaliste et revendique la France impérialiste.
Non, notre meilleure arme contre l’extrême droite est un programme anticapitaliste et révolutionnaire. Un programme qui dit haut et fort qu’il y a une autre alternative radicale au duo UMP-PS, celle de la révolution socialiste ; un programme qui oppose à la xénophobie et au patriotisme chauvin un discours internationaliste prolétarien, utile, pragmatique, concret et efficace ; un programme qui explique aux travailleurs que le seul « État fort » qui sera en leur faveur sera celui qu’ils dirigeront démocratiquement. La lutte pour ce programme anticapitaliste, qui n’est pas celui de Mélenchon, va évidemment de pair avec la nécessité d’une politique audacieuse de front unique dans l’action avec tous ceux qui s’opposeront à l’austérité de droite comme de gauche, mais sans mélanger nos drapeaux.
Pour une extrême gauche lutte de classe et de combat, qui soit à la hauteur des luttes ã venir
La montée du FN dans le contexte de crise profonde que vit l’Europe et qui pourrait bientôt frapper la France encore plus durement change la donne du débat. La vague frontiste rend encore plus urgente la construction d’un parti qui soit à la hauteur des combats ã venir. Dans l’hypothèse d’un gouvernement Hollande, si le FdG ou une de ses composantes entre au gouvernement ou le soutient, que ce soit à l’Assemblée ou ã travers d’autres instances, cela peut modifier les rythmes et tactiques que nous aurons ã adopter. Cela ne change cependant en rien notre ligne stratégique : celle de la construction d’un parti anticapitaliste et révolutionnaire de combat, se construisant sur le terrain de la lutte de classes. Ce devrait être un parti capable de démasquer l’éventuelle collaboration des directions syndicales avec l’austérité de gauche, mais aussi de préparer les travailleurs et les militants face ã un durcissement du régime si la déception par rapport ã « Hollandréou » en venait ã ouvrir la voie ã un gouvernement d’une nouvelle droite recomposée autour du FN. C’est-là notre principal défi pour la période, à la fois passionnante et dramatique, qui s’ouvre avec ces élections.
25/04/12
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