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La crise s’approfondit pour le gouvernement de Peña Nieto
par : Mario Caballero

16 Nov 2014 | La troisième journée nationale de lutte du 5 novembre a traduit le mécontentement profond qui n’a cessé de s’exprimer et de grandir tout au long du dernier mois, basé sur un manque de confiance croissant vis ã vis des institutions et sur la remise en question du gouvernement du président Peña Nieto. En quelques mois de mobilisation, l’état d’esprit de (...)
La crise s’approfondit pour le gouvernement de Peña Nieto

La troisième journée nationale de lutte du 5 novembre a traduit le mécontentement profond qui n’a cessé de s’exprimer et de grandir tout au long du dernier mois, basé sur un manque de confiance croissant vis ã vis des institutions et sur la remise en question du gouvernement du président Peña Nieto.

En quelques mois de mobilisation, l’état d’esprit de masses a basculé profondément. Ce saut dans les consciences ne peut se comprendre que dans un contexte où certaines université, dont l’université l’Université Nationale Autonome du Mexique, la plus importante du pays, multiplient les grèves, où des bâtiments publics sont occupés, où les manifestations, les blocages d’autoroute, l’occupation des péages, etc., se poursuivent et deviennent des formes de manifestations habituelles dans l’ensemble du pays.

Loin d’appaiser la mobilisation, la conférence de presse du bureau du Procureur Général de la République sur la mort des 43 étudiants de l’École Normale rurale d’Ayotzinapa, qui fut marquée d’un profond cynisme cherchant ã démoraliser l’audience, a renforcé l’indignation. Elle a permis de démontrer ouvertement que la politique du gouvernement ne consistait qu’à noyer le mouvement en divisant les familles des étudiants, le magistère et les organisations du Mouvement Populaire de Guerrero [1], ce qui ne fait qu’engendrer une polarisation sociale encore plus forte.

Le PRI (Parti Révolutionnaire Institutionnel), parti au gouvernement, n’a jamais été ã ce point à la défensive que dans ce contexte : Peña Nieto est aujourd’hui le président le plus remis en question du monde. C’est une situation inouïe qu’on n’avait même pas vu lors de la massacre des étudiants ã Tlatelolco en 1968, ou lors du fraude au candidat Cárdenas se présentant à la tête d’un courant dissident au sein du PRI (le Courant Démocratique) en 1988, ou en 1994, lors du soulèvement de l’Armée Zapatiste de Libération Nationale (EZLN), qui ont pourtant été des moments clefs dans l’histoire des crises politiques du pays.

Aujourd’hui la politisation croissante de la société prend de court les créateurs de la coalition “Pacte pour le Mexique” (Parti Révolutionnaire Institutionnel – Parti Action Nationale - Parti de la Révolution Démocratique). Dans le vaste mouvement démocratique ayant surgi récemment, on constate une participation majoritaire de la jeunesse, mais aussi des organisations de travailleurs - de l’éducation, du secteur de l’électricité, des télécommunications.

C’est pour cela que le gouvernement est incapable d’appaiser le mécontentement, et d’ailleurs, la remise en question de celui-ci ne fait que s’approfondir, avec des actions et expressions de plus en plus radicales qui dévoilent la crise d’un régime autoritaire qui ne fait que créer la misère. Aujourd’hui ce n’est pas seulement dans l’Etat de Guerrero – symbole le plus grand de l’impossibilité de gouverner - que nait la nécessité de rébellion, mais dans l’ensemble d’un pays où grandi le rejet du gouvernement et de ses attaques aux acquis sociaux démocratiques les plus élémentaires.

Un mécontentement grandissant

Après l’indignation que la barbarie commise contre les jeunes de l’École Normale d’Ayotzinapa a fait naître, c’est un mécontentement global qui surgit, contre les fausses promesses sur la démocratie, la corruption du gouvernement et des partis au Congrès, le chômage, les bas salaires, les fraudes électorales, la subordination de la justice au pouvoir présidentiel, etc. L’indignation explose face ã une démocratie sauvage qui montre son véritable visage lorsqu’elle fait disparaître, emprisoner et assassiner les dissidents politiques. Car voilà en réalité le bilan de ceux qui ont parié sur « l’avancement démocratique” il y a plus de dix ans.

Les complicités et les relations entre les narco-traficant et le conseiller municipal José Luis Abarca – qui étaient connues d’avance par la justice et le service d’intelligence fédérale – montrent elles-aussi la décomposition du pouvoir de l’État, et font que la population remet de plus en plus en question la société dans laquelle elle vit ainsi que l’illusion de la “transition démocratique”. Des expressions comme “État tueur ã gage”, “narco État”, “crime d’État” et “Peña Nieto, démission”, de plus en plus présentes dans les mobilisations, signalent la décomposition des institutions recyclées de 2000 et des partis politiques, où même le PRD qui n’est pourtant pas à la tête du pouvoir est considéré comme un parti assassin ã Guerrero. C’est une désillusion croissante qui s’exprime au sein de la population quant ã son futur et à la fiabilité des partis bourgeois “démocratiques”.

Une situation chaude et qui a du mal ã se finir

Dans les actions spontanées et radicales, dans l’ensemble du processus de mobilisation – avec en première ligne, le mouvement d’une des principales universités, l’École Polytechnique, qui est un véritable caillou dans la chaussure pour le gouvernement - et dans les slogans qui remettent en question le gouvernement, on peut constater le saut dans la conscience des secteurs de masses en lutte.

A seulement 8 mois des élections fédérales de 2015, le régime politique fait face ã un affaiblissement très préoccupant, et la démocratie sauvage n’est plus acceptée avec passivité par la population. D’où les pressions de la Maison Blanche pour que Peña Nieto regagne crédibilité. Le manque de confiance dans les institutions affaiblit le gouvernement pro-impérialiste du PRI – responsable d’avoir appliqué les plans subordonnant de plus en plus le pays au capital étranger-, le bureau du Procureur Général de la République, la Court Suprême de Justice, la Commission Nationale de Droits de l’Homme, l’Institut National Électoral, entre autres. La situation réactionnaire qui a régné récemment a donné lieu ã un phénomène démocratique national qui fait une pression par la gauche aux directions comme celle de Morena (Mouvement de Régénération Nationale) qui s’opposent ã donner une sortie radicale à la crise politique et sociale.

Il s’agit d’une situation où la stabilité politique est sérieusement menacée et qui empêche toute possibilité de retour en arrière. Des secteurs de la population travailleuse - et fondamentalement de la classe moyenne – commencent ã exprimer qu’ils ne veulent plus vivre comme avant. Cependant, nous sommes loin d’être dans une situation où l’État serait « inexistant », comme l’avancent quelques uns. Si on ne développe pas une perspective politique pour conquérir les demandes telles que “Peña Nieto, démission”, la classe dominante et ses institutions pourront trouver les moyens de résoudre la crise, que ce soit par des biais “démocratiques” - des élections anticipées - ou autoritaires, et couper ainsi le réveil des opprimés et des exploités.

Dans la situation actuelle, nous constatons clairement quelques éléments de ce que l’on appelle en terme marxiste une crise d’hégémonie, exprimée ã travers la perte de légitimité des partis traditionnels, et où les issues données par la classe dominante ne créent qu’un faible enthousiasme auprès des masses. Dans ce contexte, si la crise économique se développe et se combine avec la crise politique - une crainte reconnue par la Banque du Mexique, le Secrétaire au Trésor et le FMI – la situation pourrait se compliquer pour le gouvernement comme jamais auparavant. La dynamique ascendante de la mobilisation, l’impuissance du gouvernement incapable de la freiner et le cadre mondial de la crise capitaliste qui se répercute inévitablement sur un pays considérablement dépendant des États-Unis, ouvre de nouvelles perspectives pour la lutte des classes au Mexique.

11/11/14.

 

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