La situation grecque a été un grand sujet de débat au sein de l’extrême-gauche, et ce à l’échelle internationale. En ce qui concerne le NPA elle a traversé fortement nos débats de Congrès, que ce soit ceux sur la situation internationale, ou ceux sur les questions stratégiques que nous avons décidé d’ouvrir.
Notamment parce qu’elle réactualise les débats autour de notre hypothèse de pouvoir en tant qu’anticapitalistes et révolutionnaires. « Gouvernement anti-austérité » ? « Gouvernement anticapitaliste soutenu par des mobilisations » ? Quels rapports entre les institutions et la lutte extra-parlementaire ? Sous quelles conditions cela peut se justifier de participer ã un gouvernement élu dans le cadre des institutions actuelles ? Quelle attitude des révolutionnaires face ã des formations politiques telles que Syriza et Podemos, que certain-e-s ici ont choisi de désigner par la formule de « nouveaux réformismes » ?
Tous ces débats sont encore en grande partie devant nous mais nous devrions commencer par tirer le bilan des positions et des pronostics défendus par les uns et les autres pendant la période du Congrès. Les camarades de la P1 nous expliquaient à l’époque que l’on ne pouvait pas soutenir le peuple grec sans soutenir Syriza et Tsipras, et ont fait presque un casus belli du refus majoritaire au sein du CE de participer au meeting de la salle Japy. Ces mêmes camarades affirmaient également que l’élection de Tsipras allait encourager les luttes, que son élection était une bouffée d’air frais pour les peuples de toute l’Europe et (en paraphrasant un célèbre passage du Programme de Transition) qu’on ne pouvait pas exclure que la direction réformiste de Syriza soit poussée par les évènements ã aller plus loin que ce qu’elle aurait voulu dans sa rupture avec le capitalisme. Certains se sont même lancés sur des généralisations expliquant qu’il était très probable que les prochains processus révolutionnaires soient déclenchés par des victoires électorales. Il nous semble que le moins qu’on puisse dire aujourd’hui c’est que la réalité a réfuté sans appel l’ensemble de ces positions.
Nous avons tout de même considéré que si un pas en avant, même partiel, pouvait être fait pour tirer des conclusions de l’évolution de la situation en Grèce et définir des axes pour une politique du NPA, ce serait positif. Surtout si cela permettait de mettre le parti en ordre de bataille pour une campagne internationaliste de soutien aux travailleurs et au peuple grecs pour l’annulation de la dette que nous appelions de nos veux depuis plusieurs semaines. C’est dans cet état d’esprit et dans une démarche constructive que nous avons participé à la commission chargée de travailler sur une motion là -dessus.
Mais malheureusement ce n’est pas ce qui s’est passé. En partie du fait de renoncements des camarades de la P2 présents dans cette commission sur des positions et formulations qu’ils avaient eux-mêmes proposées, le résultat est un texte qui, certes, ne correspond pas à l’ensemble des positions de la P1, mais reste confus et imprécis et surtout ne permet pas de définir une position du parti et d’éviter les débats récurrents ã chaque fois qu’il faut se prononcer sur la signature d’un appel ou la participation ã une initiative.
Ainsi, le texte approuvé par le CPN refuse d’appeler la capitulation de Tsipras devant l’Eurogroupe par son nom, ce qui, loin de tout faux prétexte terminologique, sert ã poser les jalons pour une politique de « pression » sur un gouvernement « en dispute » comme le définit d’ailleurs clairement le texte : « Seule la mobilisation populaire sera capable de contraindre le gouvernement ã rompre son accord avec la Troïka afin d’imposer la rupture avec l’austérité ».
Non, nous ne partageons pas cette vision des choses dont la conclusion logique est une politique de soutien critique au gouvernement Tsipras. Nous sommes persuadés que, comme nous l’avions prévu lors de nos débats de Congrès, l’élection de Tsipras a joué surtout le rôle de canaliser sur le terrain institutionnel le mécontentement populaire avec l’illusion d’obtenir par ce biais ce que les masses n’ont pas pu obtenir dans la rue. Que la coalition avec l’ANEL n’est pas un fait anodin mais au contraire confère ã ce gouvernement un caractère de conciliation de classes qui ne pouvait pas présager de bonnes choses pour la classe ouvrière et les couches populaires. Qu’il s’agit dans cette situation de rester parfaitement indépendant du gouvernement pour pouvoir préparer des rebonds du mouvement de masses qui auront lieu bien plus probablement en opposition à la politique menée par Tsipras-Kammenos qu’en son soutien, aussi critique soit-il. Ou encore face ã une sortie « accidentelle » de la Grèce de la zone euro, variante qui ne correspond pas aujourd’hui à la politique de l’Eurogroupe… mais encore moins de Tsipras.
Daniela (93) Elise (93), Gaétan (31), Guillaume (75), Laura (93), Sarah (75) et Vincent (68) - élus CPN du CCR
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