Nul ne peut douter à ce stade que nous sommes face à une attaque majeure, une véritable déclaration de guerre contre l’ensemble des travailleurs. Il s’agit d’une déclinaison, sur le plan social, de l’escalade liberticide et autoritaire du gouvernement Hollande. Seule une riposte à la hauteur d’une part du mouvement ouvrier et de ses organisations pourra mettre un coup d’arrêt à cette mise à mort des droits conquis par les travailleurs pendant des décennies.
L’attaque en règle contre la durée légale du travail et les conditions de licenciement, ainsi que la méthode annoncée par la Ministre El-Khomri, qui n’a pas hésité à évoquer, dès l’annonce de son projet de réforme, la possibilité de recours au 49.3, sont sans appel. C’est bel et bien un « tous ensemble », une grève générale à l’appel de tous les syndicats, qu’il faudra pour faire face au rouleau compresseur du gouvernement Hollande.
La journée d’action, qui se discute à l’échelle des directions syndicales, prend ainsi un tout autre contenu. Elle doit se poser d’emblée non pas comme une journée isolée et folklorique, mais comme le point de départ d’un combat dans la durée et doit se préparer largement, dans chaque lieu de travail, par des assemblées générales qui informent les travailleurs de l’ampleur de l’attaque en cours, commencent à organiser la riposte et exigent l’unité syndicale derrière un plan de lutte pour empêcher l’application de la réforme.
Front unique et grève générale jusqu’au retrait de la réforme
Impopulaire pour impopulaire dans le monde ouvrier, Hollande s’apprête à rendre un ultime service au grand patronat, certainement le plus conséquent de son quinquennat. Il parie pour cela sur la stratégie de collaboration ouverte de la CFDT, ainsi que sur les crises internes à la CGT. C’est la faiblesse du mouvement syndical qui donne confiance au gouvernement pour déclencher une telle offensive, malgré sa très basse popularité et la perte d’une dernière partie de sa base sociale avec son tournant lepéniste (état d’urgence, déchéance de nationalité, etc).
C’est pourquoi, en dépit de toutes les divisions internes dans le monde syndical et du poids encore présent de l’échec du mouvement de 2010 contre la réforme des retraites, les travailleurs n’ont pas d’autre choix que de prendre les affaires en main et imposer aux organisations syndicales le front unique et un appel à la grève générale reconductible jusqu’au retrait de la réforme.
Les équipes syndicales de la CGT et de Sud devraient s’adresser sans aucun sectarisme à celles de la CFDT qui pourraient commencer à considérer que la politique de collaboration de Berger « n’a pas payé ». C’est peut-être ce qui explique qu’après avoir avalé toutes les couleuvres (ANI, Loi Rebsammen, etc.), celui-ci se voit obligé d’émettre des réserves sur la question de la réforme du licenciement économique et du plafonnement des indemnités aux Prud’hommes, en même temps qu’il prend ses distances avec ceux qui s’opposent au renforcement de la négociation contenu dans le texte.
Les syndicalistes combatifs en ligne de mire. Une bataille de toute la classe
Pour Hollande, une chose est claire : pour avancer qualitativement sur les acquis de l’ensemble du mouvement ouvrier, il a intérêt à se débarrasser des équipes syndicales combatives. Celles et ceux qui déchirent des chemises, qui séquestrent des patrons, qui refusent la conciliation permanente. Tel est le contenu profond de la condamnation à deux ans de prison (dont neuf mois fermes) de huit syndicalistes de la CGT Goodyear.
En parallèle de cette criminalisation croissante de la résistance ouvrière et syndicale, le nouveau projet de loi cherche à marginaliser de syndicats ou de sections syndicales combatives dans les entreprises. Il redéfinit la notion d’accord majoritaire en la fixant à 50% des suffrages exprimés pour les organisations représentatives (on exclut donc du calcul les suffrages pour les autres organisations), supprime le droit d’opposition et confère au patronat un nouveau droit à la consultation directe des salariés. Le but étant de réduire le rôle des représentants syndicaux dans l’entreprise à la simple validation des accords voulus par les directions et de contourner les organisations plus combatives via des référendums auprès des salariés, présentés comme étant plus démocratiques.
Il s’agit à l’évidence d’un piège. Chaque travailleur ayant vécu une expérience de lutte contre les licenciements sait que sous la pression du chantage de la fermeture et la menace du chômage, l’appel à ce genre de consultation est un outil en faveur du patron. La vraie démocratie dans le mouvement ouvrier est celle des assemblées générales et des comités de grève ou de lutte, réunissant les travailleurs de toutes les organisations syndicales à côté des travailleurs non syndiqués.
La lutte pour le retrait des poursuites contre les huit de Goodyear et l’élan de solidarité qui se cristallise dans la constitution de comités de soutien dans plusieurs villes est ainsi partie intégrante de la lutte plus générale contre l’offensive du gouvernement, ce qui peut constituer un point d’appui pour ce grand combat de classe.
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